Négociations commerciales
Le gouvernement met la pression sur les prix

Industriels et distributeurs sont convoqués à Bercy pour « accélérer » les renégociations commerciales. Le gouvernement, qui veut également prolonger le « trimestre anti-inflation », espère voir une baisse des prix à la consommation d’ici septembre. 

Le gouvernement met la pression sur les prix
Bruno Le Maire, convoquera la semaine prochaine les représentants des industriels et des distributeurs pour « accélérer » les renégociations, a-t-il annoncé le 3 mai. ©Fotolia

De Bercy à Matignon, les représentants de l’exécutif n’ont eu de cesse d’appeler à la réouverture des négociations commerciales entre les distributeurs et les grands industriels ces dernières semaines. « Ma conviction est claire : chacun doit prendre sa part, les distributeurs peuvent agir sur leurs marges et les industriels accepter des renégociations, quand le cours des matières premières a baissé », a déclaré la Première ministre, Élisabeth Borne, lors de la présentation de la feuille de route gouvernementale et de l’agenda législatif le 26 avril. Avec le trimestre anti-inflation, la grande distribution a fourni des efforts sur ses marges, concédant des baisses de prix de 5 à 7 % sur les produits concernés. De plus, Bercy est en passe d’obtenir que les distributeurs acceptent de prolonger le dispositif au-delà de la date butoir initialement prévue, le 15 juin. Côté industrie, le gouvernement compte sur la réouverture des contrats conclus au 1er mars pour répercuter la baisse des prix observée sur certains marchés de gros, comme les céréales. Le ministre de l’Économie, Bruno Le Maire, convoquera la semaine prochaine les représentants des industriels et des distributeurs pour « accélérer » les renégociations, a-t-il annoncé le 3 mai.

Alors que l’inflation des prix alimentaires semble légèrement ralentir – à 14,9 % en avril contre 15,9 % en mars selon les estimations de l’Insee –, Emmanuel Macron a assuré que la situation sera difficile « jusqu’à la fin de l’été » sur les prix alimentaires dans une interview accordée aux lecteurs du journal Le Parisien. La ministre du Commerce, Olivia Grégoire en est persuadée : une « baisse visible des prix » interviendra en septembre. « Les fruits de ces négociations vont porter à l’été, et je peux, avec une certaine certitude, vous assurer qu’à la rentrée nous aurons une baisse visible des prix dans les rayons », a-t-elle affirmé dans l’émission « Questions politiques » (Radio France, Le Monde) le 30 avril. La ministre de tutelle de la grande distribution avait précédemment assuré que le gouvernement pourrait envisager une « taxation sur les industriels agroalimentaires » si ces derniers ne jouaient pas le jeu.

Pas de renégociation « généralisée »

Qu’en est-il des renégociations sur le terrain ? Elles ont déjà « commencé », selon le président du comité stratégique des centres Leclerc, Michel-Édouard Leclerc. Le président du conseil d’administration d’Avril, Arnaud Rousseau, a indiqué fin avril que des baisses « de l’ordre de 20 % » avaient déjà été négociées sur l’huile de tournesol. Les industriels de l’agroalimentaire « feront leur part », assure le président de l’ Association nationale des industries alimentaires (Ania), Jean-Philippe André qui exclut toutefois une renégociation « généralisée ». D’une part, les cours mondiaux des matières premières ne sont pas tous à la baisse. D’autre part, les industriels sont parfois couverts par des contrats de plusieurs mois, voire une année, pour le gaz et le blé, explique-t-il. « Tant que l’on n’arrive pas à l’échéance, on ne peut pas répercuter la baisse », fait-il ainsi valoir. Face au gouvernement et à la grande distribution qui les somment de revenir autour de la table des négociations, les industriels rappellent l’existence de clauses de renégociation dans les contrats. Celles-ci permettent une réouverture des contrats en cas de fortes variations des coûts. Cependant, les niveaux ne sont pas atteints « à ce stade », explique le président de la Coopération agricole, Dominique Chargé. « Il est inenvisageable de retourner en négociation sur le dos d’une baisse de la rémunération des agriculteurs », insiste-t-il. Mais le mécanisme de clauses introduit par Égalim ne sera pas suffisant, estime de son côté le PDG de Système U, Dominique Schelcher, car « plein de contrats […] ne comportent pas de clauses de renégociations ».

J. G. (avec AFP)