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La FDSEA et les JA de l'Ain alertent les parlementaires sur les inquiétudes du monde agricole

Rencontre parlementaire / Ce 17 novembre, la FDSEA et les Jeunes Agriculteurs de l'Ain ont rencontré les sénateur Patrick Chaize et député Xavier Breton pour faire le point sur les nombreux dossiers d'actualité qui préoccupent la profession. De l'accord Mercosur à la gestion sanitaire, en passant par la filière apicole et la problématique du loup, les représentants agricoles ont exprimé leur inquiétude face au manque de cohérence des politiques publiques.

Par SG
La FDSEA et les JA de l'Ain alertent les parlementaires sur les inquiétudes du monde agricole
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Le sénateur Patrick Chaize et le député Xavier Breton à l'écoute des élus de la FDSEA de l'Ain et des Jeunes Agriculteurs de l'Ain.

Jonathan Janichon, président de la FDSEA de l'Ain, accompagné de Jérôme Martin, secrétaire général, Alexandre Despras, secrétaire général adjoint, Justin Chatard, président des JA 01, ainsi que Jean-Claude Laurent et Raoul Chavand, ont dressé un panorama complet des préoccupations du monde agricole départemental devant les parlementaires Patrick Chaize (sénateur) et Xavier Breton (député).

Mercosur : une position présidentielle qui inquiète

Le dossier Mercosur a dominé les échanges. « On a une position du chef de l'État qui change constamment», a déploré Jonathan Janichon. « Un jour il annonce qu'il ne veut pas du Mercosur, puis il fait une sortie fracassante au Brésil en annonçant la signature, et la semaine dernière il évoque des clauses de sauvegarde ». Pour les représentants agricoles, ces clauses seront difficiles à appliquer et à contrôler. « On parle de millions de tonnes de viande qui vont arriver en concurrence directe avec nos productions, dans un contexte où l'agriculture française est déjà en déclin depuis plusieurs années », ont-ils alerté.

La FDSEA rappelle que le groupe de travail du Premier ministre du 3 novembre a exprimé une position claire contre cet accord, demandant un vote au Parlement avant toute signature. « Quasiment tous les partis politiques sont contre, y compris les écologistes et le RN. La ministre de l'Agriculture elle-même y est opposée. On ne comprend pas cette décision inverse », s'est insurgé Jérôme Martin, qui espère que le Parlement européen pourra bloquer l'accord.

Taxe carbone : une charge insupportable

Le mécanisme d'ajustement carbone aux frontières (MACF), qui taxe les engrais azotés importés, suscite également de vives inquiétudes. Cette taxe représente entre 100 et 150 euros par tonne d'engrais, soit plus d'un quart du prix actuel de 450 euros la tonne. "Dans un contexte économique déjà très difficile pour les cultures, cette charge supplémentaire est inacceptable", a martelé le secrétaire général Jérôme Martin. « Une plante a besoin d’eau, de soleil et d'azote. Si on diminue la dose, on diminue le rendement. C'est aussi simple que ça ». Les agriculteurs dénoncent l'incohérence d'une politique qui pénalise la production française au profit de pays hors Europe, comme la Russie ou l'Ukraine, non soumis à ces contraintes.

Filière apicole : professionnalisation urgente

Raoul Chavand a exposé la situation critique de la filière miel. Les importations représentent 50 à 60 % du marché français, avec des produits vendus moins de deux euros qui ne sont souvent pas du vrai miel. « La consommation française est de 45 000 tonnes. Si 50 % sont du miel d’importation, il ne reste que 20 000 tonnes de marché pour les apiculteurs français, alors que nous produisons 35 000 tonnes cette année », a-t-il expliqué.

Le département produit actuellement entre 300 et 500 tonnes de miel, mais les producteurs croulent sous les stocks invendus. « Mon exploitation a plusieurs dizaines de tonnes de miel en stock. On ne peut pas le vendre à trois euros quand il coûte cinq euros à produire », témoigne Raoul Chavand. La profession réclame une application stricte du nouveau règlement européen sur l'étiquetage prévu pour juin 2026, même si elle reste sceptique sur les capacités de contrôle.

Au-delà de la concurrence déloyale, la filière fait face à une urgence sanitaire avec le varroa et demande une professionnalisation accrue. « Avec le réchauffement climatique et le frelon asiatique, l'apiculture devient extrêmement technique. On ne peut pas laisser des amateurs mal formés créer des foyers de maladies », argumente l’apiculteur. La FDSEA demande que tous les apiculteurs, professionnels comme amateurs, intègrent les structures sanitaires comme le GDS, sur le modèle de ce qui existe en élevage bovin.

Le département de l'Ain fait figure de pionnier au niveau régional dans la lutte contre le frelon asiatique. Pourtant, malgré ce statut de pilote et les moyens déployés, les résultats restent mitigés. Selon Raoul Chavand, les actions menées permettent de limiter une explosion incontrôlée des populations, mais ne suffisent pas à faire reculer le prédateur qui continue sa progression sur le territoire.

Le problème est aggravé par un manque de coordination territoriale. « Avec la région Bourgogne-Franche-Comté, il y a un travail qui est minime, voire inexistant. On est repeuplé par la Saône-et-Loire et le Jura », déplore l'apiculteur. Dans le sud de la France, les impacts sont encore plus sévères : « Les productions sont impactées, les gens ne remontent pas les cheptels, les cheptels s'effondrent ».

Face à cette menace sanitaire persistante, la FDSEA demande une meilleure structuration de la lutte via les GDS (Groupements de Défense Sanitaire), sur le modèle de ce qui existe pour les autres productions animales, afin d'optimiser les moyens et d'accélérer la réponse dans les départements moins avancés.

DNC : des éleveurs en attente d'indemnisation

La dermatose nodulaire contagieuse reste un sujet brûlant. Des éleveurs sont bloqués depuis le 29 juin, avec d'énormes problèmes de trésorerie. « Certains attendent entre 15 000 et 25 000 euros d'indemnisation », précise Jonathan Janichon, qui préside également l’association Filière Bov’Ain. Celle-ci a accordé des crédits à taux zéro, mais « on ne peut pas tout faire tout seuls ».

Les représentants agricoles dénoncent une incohérence budgétaire : « Quand on nous annonce une enveloppe de 100 000 pour poser des colliers à des loups et qu'on nous dit qu'il n'y a plus d'argent pour la DNC, il y a un problème de priorités ». Ils réclament également une défiscalisation des indemnités pour les éleveurs qui reconstituent leur cheptel, afin qu'ils ne soient pas doublement pénalisés.

Chambres d'agriculture menacées

La possible suppression des chambres d'agriculture départementales au profit d'une fusion régionale inquiète fortement. « Dans une grande région comme la nôtre, ce ne serait pas possible. Les chambres jouent un rôle essentiel de pilotage », défend Jérôme Martin. La FDSEA demande que les régions gardent la latitude de décider, sans qu'une réforme soit imposée par la contrainte budgétaire.

Loup : pour une révision du plan de gestion

Enfin, la question du loup a été abordée. Avec une population estimée proche de 2 000 individus contre 1 000 officiellement, les attaques se multiplient, y compris en plaine et sur bovins. « Le dernier loup tué sur la route pesait 40 kg, ce n'est pas le petit animal mignon qu'on voit dans les médias », rappelle Jonathan Janichon.

L'incohérence budgétaire est criante : 50 millions d'euros pour 1000 loups contre 500 millions pour les 17 millions de bovins français. « On met 50 000 euros par loup contre 30 euros par bovin. Où est la logique ? », interroge le président des JA. La profession demande la révision du seuil de 19 % de prélèvements autorisés et davantage de facilités pour les tirs de défense.

Les parlementaires ont pris note de l'ensemble de ces préoccupations, s'engageant à les porter au niveau national et à soutenir les positions défendues par la profession agricole de l'Ain.

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