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Séchage en grange

Cuma Luzerne de Bresse : un atout pour les éleveurs

Treize exploitations adhèrent à la Cuma Luzerne de Bresse dont l’unité collective de séchage, basée à Lescheroux, permet de valoriser près de 3 000 tonnes de fourrages et maïs sec. Le séchage en grande : une technique qui a fait ses preuves en matière d’autonomie alimentaire. Explications.

Cuma Luzerne de Bresse : un atout pour les éleveurs
La mise en cellules de séchage par le salarié de la Cuma. ©PF

L’unité de séchage collective de luzerne basée à Lescheroux, portée par la Cuma Luzerne de Bresse et ses quinze exploitations adhérentes, était à l’origine avant tout dédiée au séchage et au stockage de la luzerne, mais pas seulement. Au-delà du séchage de fourrage (foin, luzerne), l’unité offre la possibilité de sécher du maïs. Sa création remonte à l’année 2013. Un projet pilote, réalisé avec l’appui de la Chambre d’agriculture, et soutenu financièrement par l’Etat, l’Ademe, le conseil régional Rhône-Alpes et le Département de l’Ain à hauteur de 38 %, pour un investissement global d’1,9 million d’euros. 

Douze ans plus tard, l’unité de séchage tourne à plein régime. En 2024, les volumes réalisés s’élèvent à près de 2 000 tonnes de luzerne et foin, et quelque 1 000 tonnes de maïs sec. Le bâtiment, d’une surface totale de 3 500 m², regroupe douze cellules de séchage de 1 000 m3 chacune. Trois énergies renouvelables sont associées : le soleil, la méthanisation et la biomasse. La récupération de chaleur du soleil sous la toiture, ainsi que l’eau chaude issue d’une unité de méthanisation située à moins de 300 mètres (Sarl Méthanéa), contribuent à augmenter la température de l’air utilisé pour le séchage. Les objectifs de départ – l’autonomie alimentaire, la production de protéines en circuit court et d’énergie renouvelable, ainsi que le séchage de fourrage et maïs – sont aujourd’hui atteints. 

Les multiples avantages du séchage en grange

Interrogé sur le développement de l’outil, le salarié de la Cuma explique : « Le profil des adhérents a évolué du fait de la décroissance de l’élevage. Mais le point positif est l’arrivé de deux nouveaux adhérents en 2024/2025, un élevage allaitant et un laitier. Le changement climatique fait que l’on rentre du fourrage de plus en plus tôt. Cette année par exemple, tous les adhérents avaient fini leur première coupe au 5 mai, et cette semaine on est déjà dans la deuxième coupe. Ce qui permet les années très sèches d’avoir terminé les deuxième et troisième coupes au 14 juillet. L’année passée, très humide, par de petites fenêtres de tir, nous avons pu rentrer du fourrage dans des conditions acceptables du fait du séchage ». 

Et les avantages du séchages sont nombreux : « Cela permet de sortir des fourrages de très haute qualité, riches en valeur nutritionnelle, des foins très digestibles, qui font 20 % de MAT (Matière azotée totale) et qui approchent 1 UF (Unité fourragère) aussi bien en lait qu’en viande. Cela ramène de la valeur alimentaire à l’élevage en autoconsommation, et pour ceux qui commercialisent, permet de vendre un fourrage haut de gamme ». Des bénéfices pour l’éleveur confirmés par Quentin Faussurier, installé en 2020, l’un des quatre associés de l’Earl des Bruyères, à Lescheroux (élevage de chèvres, cochons et canards gras, transformation et vente directe, sur une SAU de 60 ha, dont 40 ha de prairies, 12 ha de maïs et 10 ha de blé). Il témoigne : « Nous avons réalisé la première coupe de foin la deuxième semaine d’avril et la seconde est prévue cette semaine. On n’aurait jamais pu ramasser du foin à cette période si on n’avait pas le séchage en grange. Auparavant nous avions essayé l’enrubannage pour nourrir les chèvres, mais ça a été une catastrophe car la chèvre est hyper sensible aux mycotoxines et aux moisissures ». En résumé, adhérer à la Cuma Luzerne de Bresse « permet de faucher plus tôt, sur des plages de météo qui seraient impossibles autrement. En qualité nous avons des foins qui dépassent largement 1 UFL (unité fourragère lait), alors qu’autrement on serait sur du 0,6 – 0,7. On fait également sécher tout notre maïs ici, soit 100 tonnes de maïs sec en 2024, également de très bonne qualité car séché à basse température. Amidon et protéines sont conservé, ce participe à produire du foie gras de qualité, d’un beau jaune doré ».

La luzerne, une culture exigeante

Autre témoignage recueilli, celui de Guillaume Favier, associé avec son père et son oncle au Gaec du Midys : 140 Montbéliardes, une SAU de 300 ha dont 80 ha de prairies (dont une quarantaine en prairies naturelles), 15 ha de luzerne, 100 ha de maïs, 80 ha de céréales à paille et 20 ha de colza. « En luzerne, on atteint dix tonnes de matière sèche tous les ans. Nous avons un engagement de 100 tonnes à la Cuma, mais l’an passé nous avons récolté 250 tonnes, dont 150 tonnes de luzerne et le reste en regain », explique l’éleveur qui avoue trouver lui aussi beaucoup d’avantages à adhérer, avec cependant un bémol concernant le coût à la tonne. La prestation étant facturée 135 euros, comprenant la récolte, le séchage et le conditionnement en bottes carrées. 

La luzerne est indéniablement une culture intéressante, mais exigeante. « En trois jours on arrive à rentrer notre luzerne. On la travaille tôt le matin, à la rosée. Le premier jour on fauche et on pirouette dans la foulée. Le lendemain matin on pirouette de nouveau à la rosée, et le troisième jour on andaine le matin, toujours à la rosée. La marchandise est livrée humide mais cette humidité s’évapore très rapidement dans les cases de l’unité de séchage », précise l’éleveur. Autres points importants : « il faut apporter de l’engrais de fond, du phosphore et de la potasse, ainsi que du souffre. Et rester vigilant sur le salissement. On l’implante autour du 15 août en même temps que le colza. La coupe – une coupe de nettoyage – est réalisée fin avril et ensuite tous les mois, soit cinq coupes par an. Après trois ans on enchaîne par du blé ». En résumé, pour Guillaume Favier, « l’unité de séchage est un bon outil, qu’il faut garder dans le temps, mais qui reste onéreux ».

Patricia Flochon

Fiche d’identité de la Cuma

15 exploitations adhérentes

Volumes réalisés en 2024 : 2 000 tonnes de luzerne et foin et 1 000 tonnes de maïs sec

12 cellules de séchage de 1 000 m3 chacune.

Trois énergies renouvelables : solaire, méthanisation, biomasse (bois déchiqueté).