INNOVATION
Le Tubutube : un améliorateur de climat responsable

Gagner en précocité sur les récoltes, éviter le gel sur une production locale de tomates sous serre bioclimatique, ce sont autant de défis que relève le Tubutube, une technologie développée par l’institut technique horticole Ratho-Astredhor Auvergne-Rhône-Alpes.

Le Tubutube : un améliorateur de climat responsable
Mickaël Rollet (à gauche), agriculteur et Bernard Darfeuille, responsable technique du Ratho, échangent régulièrement au sujet des Tubutubes. ©ZB

« Quand je suis arrivé sur les marchés avec mes tomates à la mi-mai, les collègues producteurs ont jasé : certains ont dit que je les avais achetées ! » Sous un tunnel de sa serre bioclimatique, Mickaël Rollet se rappelle, amusé, de sa première récolte de tomates cultivées en utilisant des Tubutubes. L’agriculteur, installé à Saint-Germain-Lespinasse (Loire), possède une exploitation de 35 ha. Son activité principale est le maraîchage réparti entre 6 ha de plein champ et 8 500 m2 de serre en tunnel froid. L’année dernière, il utilisait pour la première fois le système des Tubutubes dans une de ses serres. Le Tubutube, rempli d’eau, est installé au sol à proximité des cultures. Ce tube en PVC fonctionne par hydroaccumulation. L’eau qu’il contient est chauffée la journée par le soleil. Le dispositif accumule la chaleur qu’il restitue pendant la nuit et les périodes nuageuses. Le principe de fonctionnement est le même que les serres solaires passives chinoises qui sont exposées au soleil uniquement par leur face sud : des murs en brique ou en terre sont disposés sur les trois autres côtés des serres pour emmagasiner puis restituer la chaleur.

En France, le système Tubutube a été développé par la station d’expérimentation du Ratho, en partenariat avec le bureau d’études Agrithermic et l’entreprise la Baronne Citaf. Son installation a permis à Mickaël Rollet de gagner plusieurs semaines de précocité sur ses tomates. « Je les ai amenées sur les marchés au moment où les tomates espagnoles arrivaient. Les gens étaient surpris qu’elles soient cultivées ici, mais elles sont vite parties comme des petits pains. » Séduit, Mickaël renouvelle l’expérience cette année. Sous un tunnel de 500 m2, il a planté deux variétés de tomates à la fin février, uniquement des pieds greffés. « Ils sont plus résistants mais moins précoces, d’où l’intérêt de les cultiver avec des Tubutubes », explique-t-il. Ses tomates sont plantées depuis fin février : les rangs sont conduits par deux ; un Tubutube est placé de chaque côté des plants. Le système réchauffant à la fois l’air ambiant et le sol, le réseau racinaire des plants se développe plus rapidement. La présence de Tubutubes dans la serre réduit l’écart de température entre le jour et la nuit, ce qui permet d’éviter le risque de gel et donc de planter beaucoup plus tôt en terre. « Dans la nuit de vendredi dernier (le 16 mars, ndlr), il faisait - 3 °C à l’extérieur de la serre et 4 °C à l’intérieur », constate Mickaël Rollet.

Compétitivité et respect de l’environnement

L’installation des Tubutubes dans la serre a nécessité une journée de travail. « En amont, j’avais préparé mes planches de culture deux semaines avant la mise en terre, avec du compost et un paillage plastique », explique le maraîcher. Les Tubutubes ont été déroulés et remplis d’eau. Plusieurs dizaines de litres sont stockées au mètre carré dans la serre où poussent les tomates. « Il y a un volume nécessaire pour que le système soit efficace mais, peut-être, peut-on encore gagner en efficacité par d’autres moyens », explique Bernard Darfeuille, responsable technique et opérationnel à l’origine du système. Dans la serre de Mickaël Rollet, deux ventilateurs ont été installés au plafond. Tournant en permanence, ils permettent de faire redescendre la chaleur au sol et ainsi rendre la température encore plus homogène. Deux sondes, une pour l’air ambiant et une pour les tubes, permettent à Bernard Darfeuille de surveiller le fonctionnement du dispositif.

Outre son intérêt compétitif, cet améliorateur de climat passif fonctionne à l’énergie solaire, gratuite. La température, plus élevée et plus stable, autorise l’introduction d’auxiliaires plus tôt dans les cultures. Dans la serre, une ruche de bourdons est d’ores et déjà en place pour aider à la pollinisation. Pour l’instant, l’agriculteur est le seul détenteur de la version finale des Tubutubes. Mais le système est testé sur d’autres exploitations et types de culture, notamment à Carpentras, chez un producteur de cerises. Sa commercialisation devrait arriver prochainement. « Le prix dépendra du type de culture et de la production », conclut Bernard Darfeuille.

Z.B