PARITÉ
« Encore du travail à faire » pour féminiser les OPA

La place des femmes progresse parmi les responsables d’organisations professionnelles agricoles (OPA). Mais, entre charge mentale et représentations dominantes, la sociologue à l’Inrae Clémentine Comer pointe un désengagement plus rapide que les hommes.

« Encore du travail à faire » pour féminiser les OPA
Clémentine Comer, sociologue à l'Inrae. ©Paysan_breton

Intervenant à une table ronde de l'Afja (journalistes agricoles) le 8 mars, la sociologue à l'Inrae Clémentine Comer observe une « féminisation tendancielle mais lente » dans les organisations professionnelles agricoles (OPA). « Il reste encore du travail à faire », souligne-t-elle, ajoutant que la représentation des femmes est « un sujet assez peu interrogé par les OPA elles-mêmes ». Lors de sa thèse, la chercheuse a étudié l'évolution de la place des femmes dans trente-neuf OPA bretonnes (syndicats, chambres, organismes d'accompagnement, etc.). Entre 1990 et 2015, la part d'élues dans les conseils d'administration y a presque doublé, passant de 13 % à 26 % environ. Un chiffre en ligne avec la proportion de femmes cheffes d'exploitation en France (26,2 % en 2020, en léger recul sur dix ans).

Plafond et paroi de verre

« La prise de mandat des femmes est plus versatile », précise Clémentine Comer, car elles sont plus sujettes que les hommes à « une forme d'épuisement militant », et donc à un « désengagement plus rapide ». Un phénomène qui peut s'expliquer par les mentalités et représentations dominantes - qui peut aller jusqu'au sexisme - par le fonctionnement même des OPA, ou encore par la charge mentale accrue que supportent les femmes. Résultat : en plus d'un « plafond de verre », les élues agricoles se heurtent à une « paroi de verre ». « Quasiment absentes des mandats prestigieux », elles sont souvent cantonnées aux mêmes fonctions (communication, social, agrotourisme, etc.), relève Clémentine Comer. Le plus « symptomatique », selon elle, étant le cas des coopératives, dont seuls 9,7 % des dirigeants sont des femmes. La présidente de la FNO (éleveurs d'ovins, FNSEA), Michèle Boudoin, estime à 15 % la part des femmes dans les instances de son syndicat, dirigé par deux femmes. « Rien ne se fera sans nos confrères hommes », affirme cette éleveuse du Puy-de-Dôme. Dans un rapport sur la situation des femmes dans les territoires ruraux, présenté le 14 octobre, la délégation aux droits des femmes du Sénat recommandait déjà de s'emparer de cette question de la parité. Les sénateurs préconisent en effet d'établir des quotas de femmes dans « les instances de gouvernance agricole » (chambres d'agriculture et syndicats professionnels NDLR.) et d'envisager de tels quotas « dans les conseils d'administration des coopératives et des interprofessions ».

YG, LM