Découverte
Ils cultivent du houblon bio en Bresse

Etienne Grosjean
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Les filières régionales de houblon sont en pleine expansion. A Montracol, Fabien Repiquet et ses deux associés cultivent 4 ha de houblon bio qu’ils transforment sur place pour une clientèle de brasseurs artisanaux. Rencontre.

Ils cultivent du houblon bio en Bresse
Fabien Repiquet, satisfait par la qualité des cônes.

C’est fait. Les trois associés de la ferme du Houblon du Moulin ont terminé la récolte 2020, soit près de 4 ha de cultures situés à cheval sur Montracol et Montcet. Après une année de réflexion et deux ans de mise sur pied du projet, les trois trentenaires pluriactifs trouvaient leur future ferme via le RDI (Répertoire Départ Installation), soit 25 ha au total dont quatre consacrés à la culture de houblon 100 % bio.

Pourquoi du houblon et pas une autre production ? Fabien Repiquet, 33 ans, originaire du Nord Isère, formé à la « valorisation des agro-ressources », explique : « On connaissait des brasseurs de l’agglomération lyonnaise et stéphanoise qui avaient des besoins. Les grands bassins de production sont en Amérique du Nord, en Europe de l’Est, et en Allemagne. La France représente 1 % du marché mondial, avec près de 500 ha en Alsace (dont 80 % de la production part à l’export), une cinquantaine d’hectares en Loraine et une trentaine d’hectares sur le reste de la France. Nous avons fait des stages dans plusieurs houblonnières via l’association Houblons de France à laquelle nous adhérons, ainsi qu’à l’association des producteurs de houblon d’Auvergne Rhône-Alpes (Aphara) ».

 

Des lianes de 7 mètres de haut

 

 

C’est dans un terrain meuble, riche en matière organique, que les associés ont fait pousser leurs plants achetés en 2019 à un pépiniériste d’Angleterre (l’un des deux principaux fournisseurs de plants, l’autre étant italien). Neuf variétés, dont un houblon « amérisant » et des houblons aromatiques prisés par les brasseries artisanales. Avant la plantation, il aura fallu installer des poteaux (de sept mètres de haut) et un réseau d’une trentaine de kilomètres de câbles. « Ce sont des rhizomes qui ont une durée de vie de quinze à vingt ans. Les rendements montent en puissance d’année en année. Au mois d’avril, quand la plante démarre, on sélection les bonnes lianes qui partent sur le support. Chaque plant donne entre dix et quinze lianes et l’on en retient trois par fil. On pratique en même temps un « accompagnement » pour les enrouler correctement : c’est le travail de la mise au fil, qui s’effectue mi-mai. Et ensuite tout va très vite. Début mai les plants font 50 cm de haut, pour atteindre six mètres fin juin », explique Fabien Repiquet. La floraison a lieu fin juin – début juillet, et les cônes apparaissent début août – septembre en fonction des variétés. La récolte est effectuée de fin août à mi-septembre, voir fin septembre pour la variété la plus tardive.

 

Le pellet de houblon, quèsaco ?

 

Le houblon, une fois trié et séché est transformé en pellets qui serviront à la fabrication de la bière.

 

Etapes suivantes : le tri des cônes, le séchage et la transformation. L’exploitation a investi dans une trieuse, les déchets étant ensuite broyés et compostés. Suivra un séchage « actif » à air pulsé chaud à 50°C pendant six heures (le houblon stabilisé peut être stockés sous froid à 7-8 °C). Lors de la transformation, les cônes sont broyés avant de passer sous une presse spéciale pour obtenir les « pellets » utilisés pour la fabrication de la bière. « Quelques centaines de grammes de pellets suffisent pour faire plusieurs centaines voire milliers de litres de bière. En conventionnel, ce sont de 1,5 tonne à 2 tonne par hectare en sec, nous qui sommes en bio, nous faisons 750 kg/ha », précise Fabien Repiquet qui travaille pour une clientèle exclusivement régionale (brasseries artisanales ou amateurs), entre Mâcon, Bourg-en-Bresse, la plaine de l’Ain, le Nord Isère, l’agglomération lyonnaise et stéphanoise. Et d’ajouter : « On trouve aujourd’hui très peu de bio disponible sur le marché mondial. Rhône-Alpes est la première région brassicole de France pour la bière artisanale, c’est suffisamment intéressant pour qu’une ferme comme la nôtre se développe. L’intérêt pour le brasseur est qu’il peut venir voir sur place comment est produit son pellet, et pour nous d’avoir du lien avec nos brasseurs. Il faudrait une centaine d’hectares en Auvergne Rhône-Alpes pour fournir les brasseries. On en est aujourd’hui à une vingtaine plantés par les 320 adhérents de Houblons de France, dont plus de 90 % en agriculture biologique, donc il y a du potentiel ».

Pour leur production, les trois associés ont investi 600 000 € (matériels et bâtiment de 400 m²). Objectif : doubler le nombre d’hectares d’ici cinq à six ans.

 

Patricia Flochon