MINISTÈRE
Exploitations sociétaires : progrès et limites du recensement

Le recensement agricole 2020 a apporté de premières données sur la répartition du capital des exploitations de formes sociétaires. Mais les chercheurs pointent encore les difficultés à connaître les détenteurs de capitaux.

Exploitations sociétaires : progrès et limites du recensement
En moyenne, le capital des exploitations sociétaires est détenu à 80 % par des associés exploitants, et à 20 % par les non-exploitants (dont 11 % familiaux, 1 % non familiaux, 8 % de personnes morales). ©P Xicluna_agri.gouv.fr

À l’occasion d’un colloque organisé par le ministère de l’Agriculture sur le recensement agricole 2020, les intervenants ont bien sûr rappelé toute l’importance de ce travail décennal, sans équivalent pour la Ferme France. Mais ils en ont plusieurs fois pointé les limites, notamment pour caractériser certains phénomènes émergents, comme la complexification des montages sociétaires. L’édition 2020 a certes apporté de premiers éléments de description de ce phénomène, qui plaident pour une ampleur encore limitée en termes d’effectifs. Le chercheur de l’Inrae, Laurent Piet, a livré de premiers résultats concernant la détention du capital des exploitations de formes sociétaires (120 000 exploitations hors Gaec), pour la première fois étudiée durant cette édition. « Le capital reste majoritairement détenu par les associés exploitants », a annoncé le chercheur. En moyenne, le capital de ces exploitations sociétaires est détenu à 80 % par des associés exploitants, et à 20 % par les non-exploitants (dont 11 % familiaux, 1 % non familiaux, 8 % de personnes morales). Les formes EARL (74 900 exploitations) se distinguent avec un capital détenu à 91 % par les associés exploitants, contre 61 % pour les autres formes (p.ex. SCEA). Globalement, la présence des associés non exploitants non familiaux (personnes physiques) reste rare ; ils ne sont présents que dans 3 % des sociétés hors Gaec. Et les exploitations détenues à 100 % par d’autres personnes morales représentent 4 % des sociétés ; toutefois, la production brute standard de ces 6 000 sociétés est plus que deux fois supérieure à la moyenne.

Des marges mal caractérisées

Il n’en reste pas moins que le recensement des détenteurs de capitaux et des liens entre exploitations sociétaires a été pointé plusieurs fois comme une limite de l’exercice de description de la concentration du secteur. Tout un symbole : entre 2010 et 2020, le nombre d’exploitations de plus de 1 000 hectares a diminué selon le recensement, ce qui semble peu crédible aux yeux du chercheur de l’Institut de l’élevage Christophe Perrot. Il remarque par ailleurs que, parmi les 112 000 exploitations spécialisées en grandes cultures recensées en 2020, 21 000 ne disposent que de 10 hectares de grandes cultures, ce qui rend peu probable leur exploitation par leurs propres moyens de production. « Nous avons un appareil statistique qui a des difficultés à appréhender les modalités d’association », a résumé le chercheur de l’Ensat Toulouse François Purseigle. Pour pallier ces difficultés, le chercheur Laurent Piet porte notamment un projet d’appariement du recensement avec la base de données des liaisons financières (Lifi).

M.R