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La CNR poursuit ses missions d’aménagement du Rhône

La concession du Rhône attribuée à la Compagnie nationale du Rhône (CNR) a été prolongée jusqu’en 2041. Retour sur les enjeux qui en découlent et sur les missions de la CNR avec Clémence Aubert, responsable du département pilotage stratégique et missions d’intérêt général et Guénaëlle Corbin, cheffe de projet – référente agriculture à la CNR.

La CNR poursuit ses missions d’aménagement du Rhône
Clémence Aubert, responsable du département pilotage stratégique et missions d’intérêt général à la CNR. ©CNR

La concession du Rhône attribuée à la CNR a été prolongée jusqu’en 2041 : quels sont les enjeux de cette prolongation dans le contexte d’ouverture à la concurrence des barrages en France ?

Clémence Aubert : « Pour nous, cette prolongation, actée par la promulgation de la loi relative à l’aménagement du Rhône, nous permet de prolonger nos missions jusqu’en 2041. Le modèle tout à fait spécifique de la Concession du Rhône qui lie trois missions solidaires et indissociables que sont la production d’hydroélectricité, la navigation et le développement du transport fluvial ainsi que l’irrigation et les autres usages agricoles, est donc préservé. Il permet au concessionnaire de gérer le fleuve dans toutes ses dimensions et de concilier les différents usages de l’eau du fleuve. C’est ce modèle que l’État a souhaité reconduire pour une vingtaine d’années. La mise en concurrence n’interviendra donc pas avant décembre 2041. Il faut d’ailleurs noter que la loi sur l’aménagement du Rhône a été votée à l’unanimité (votée le 17 février par le Sénat et promulguée le 1er mars NDLR), il y a donc une large adhésion des parlementaires à ce modèle de gestion intégré d’un fleuve. »

La prolongation de la concession amène-t-elle de nouvelles missions pour la CNR ?

C.A. : « Sur le volet agricole, le schéma directeur annexé au cahier des charges général de la concession prévoit de nouveaux champs d’action pour la CNR au titre des plans 5Rhône (nouveau nom des missions d’intérêt général NDLR). Nous pourrons accompagner techniquement et financièrement des actions dans les domaines de l’irrigation, de l’énergie, de la transition agroécologique et dans l’accompagnement du monde agricole face au changement climatique. Ce sont des actions que nous menions déjà par le passé mais sur lesquelles nous allons être beaucoup présents maintenant. »

Guénaëlle CORBIN : « Nous allons pouvoir accompagner plus largement le monde agricole avec les plans 5Rhône, sur lesquels nous envisageons de lancer un appel sur la thématique de l’agroécologie. Il est en cours de préparation et nous devrions communiquer dessus d’ici la fin d’année, pour que les porteurs de projets puissent candidater et que nous les accompagnions dans leurs actions de transition. »

Le changement climatique représente un enjeu majeur pour la CNR. Comment y répondre, notamment sur le volet agricole ?

C.A. : « Nous allons intervenir sur différents axes : concernant l’irrigation, on sait que l’agriculture est davantage sous pression avec le changement climatique. Nous allons participer à la modernisation et à la restauration des réseaux d’irrigation existants, pour pérenniser et préserver l’accès à la ressource en eau. Nous allons également accompagner les études sur les projets de substitutions qui permettent d’avoir un accès à une ressource moins fragile. Dans les Hauts de Provence rhodanienne, des prélèvements interviennent par exemple dans la nappe du Miocène et les cours d’eau fragiles comme l’Aygues, l’Ouvèze et Lèze. Des projets sont donc étudiés pour utiliser l’eau du Rhône à la place. »

G.C. : « Nous soutenons aujourd’hui plusieurs projets comme l’optimisation énergique et la transition agroécologique du monde agricole. Nous sommes par exemple partenaires de la chambre d’agriculture de la Drôme sur la plateforme TAB, un site dédié à l'expérimentation et à la démonstration de techniques alternatives et biologiques. Cette plateforme mène ses expériences sur plusieurs champs comme l’agroforesterie mélangée à des couverts végétaux par exemple, ou encore des infrastructures agroécologiques, avec un suivi scientifique sur 5 ans. Le but est d’apporter des connaissances scientifiques et de prouver le bien-fondé de ces pratiques pour que les agriculteurs puissent les mettre en action sur leur exploitation. Cela passe notamment par des programmes de communication, de sensibilisation et de formation auprès de ce public. Nous menons aussi des actions pour réduire la vulnérabilité des agriculteurs face aux crues. Dans le cadre du plan Rhône, le dispositif Reva (réduction de la vulnérabilité agricole) mène deux types d’actions. Une phase d’animation qui permet aux agriculteurs de se manifester pour diagnostiquer leur exploitation d’une part, et une autre partie avec des travaux de réalisations pour faire face aux risques. La CNR finance ces travaux à hauteur de 60 % et 10 % pour l’animation, le dispositif étant porté techniquement par des chambres d’agriculture. »

Propos recueillis par Zoé Besle