RECONVERSION PROFESSIONNELLE
« Je voulais trouver des solutions, mais je faisais partie du problème »

Ludivine Degenève
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Jacques Ducarre était ingénieur en Isère. Il y a deux ans, sa vie a pris un tout autre tournant puisqu’il a décidé de devenir maraîcher dans le Sud de l’Ain. Zoom sur cet homme qui a décidé de changer de vie pour œuvrer à son échelle à la préservation de la planète.

« Je voulais trouver des solutions, mais je faisais partie du problème »
Jacques Ducarre s’installera au 1er janvier 2024 au Gaec des Flam’en vert à Peyrieu. PHOTO/ LD

« Aujourd’hui, j’ai l’impression de me mettre du côté des solutions. » Voilà maintenant trois ans que Jacques Ducarre a eu le déclic : trouver un emploi qui lui permettrait d’être acteur dans la lutte contre les catastrophes environnementales actuelles. « La prise de conscience, c’est de se dire qu’on est dans une situation climatique et sociale catastrophique. On a des pauvres qui sont de plus en plus pauvres et des riches de plus en plus riches, et en plus on a une planète de moins en moins habitable pour les générations futures. Continuer à être dans ce système-là m’était insupportable. C’est pour ça que je suis sorti de ça. Je voulais trouver des solutions, mais je faisais partie du problème. »
 
« J’ai fait ce que j’ai pu »
 
Anciennement ingénieur dans l’industrie aéronautique en Isère pendant 17 ans, Jacques Ducarre a décidé de tout plaquer pour se lancer dans une activité maraîchère dans l’Ain. « Souvent, dans la population d’ingénieurs, on voit beaucoup de gens déçus parce que ce n’est pas que construire des Lego, explique-t-il en souriant, avant de reprendre d’un ton plus grave. On fait partie du système capitaliste qui nous a mis dans la merde dans laquelle on est aujourd’hui. » Pour mener à bien ce projet professionnel, le jeune exploitant a opté pour une transition douce : « J’ai fait une demande d’activité à temps partiel qui m’a permis de continuer mon travail d’ingénieur et de me former en parallèle. » Ce choix lui a donné l’occasion de se lancer en automne 2021 dans un Bac pro conduite de production horticole par correspondance, qu’il a obtenu à la fin de la même année. 
Une activité qu’il pratiquait déjà en tant qu’amateur : « C’est le plus proche de ce que je connaissais. Je suis jardinier amateur depuis une dizaine d’années, instinctivement je me suis dit « je sais faire pousser des légumes, j’arrive à nourrir ma famille avec ça, pourquoi pas changer d’échelle ». » Il espère qu’à son niveau, cet engagement permettra de changer les choses. « À la fin du bilan de ma vie, j’espère me dire « j’ai fait ce que j’ai pu ». »
 
Une installation prévue en janvier 2024
 
Pour renforcer ses premiers acquis, Jacques Ducarre a réalisé plusieurs stages à côté. Il a débuté son expérience professionnelle dans le maraîchage avec la pratique du woofing : travailler dans les fermes une demi-journée en échange du gîte et du couvert. Il s’est ensuite plongé en immersion complète chez un maraîcher en Isère en juin 2021, pour ensuite travailler au Gaec des Flam’en vert à Peyrieu, où il va définitivement s’installer au 1er janvier 2024. « On a les mêmes objectifs, les mêmes valeurs », expose Jacques Ducarre, qui était jusqu’à ce jour à temps partiel sur l’exploitation. Toutes ces rencontres l’ont conforté dans son choix de devenir maraîcher : « J’ai découvert une agriculture pensante. Je ne rencontre que des gens qui sont là par choix, qui sont motivés et qui ont des convictions, et ça, c’est porteur », confie le futur exploitant. 
Après avoir officiellement démissionné de son poste d’ingénieur en 2022, ce n’est que cette année qu’il va passer à un temps plein, par le biais d’un « stage test », proposé par la Chambre d’agriculture de l’Ain.