L’AIN DE FERME EN FERME
Producteurs et éleveurs : une passion communicative qui fait mouche

Patricia Flochon
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Organisée par l’Afocg, la dix-septième édition de l’Ain de ferme en ferme a tenu ses promesses, malgré une météo capricieuse. Visite guidée d’une exploitation maraîchère à Lagnieu et d’une ferme en polyculture élevage sur les hauteurs de Varambon. 

Producteurs et éleveurs : une passion communicative qui fait mouche
La Ferme de Prou : Jérôme Jolivet (à droite), Agnès Coudrin sa compagne et Loïc, salarié en boucherie charcuterie. ©PF

Week-end mitigé pour l’Ain de ferme en ferme cette année, en demi-teinte, marqué samedi par le soleil et une douce chaleur printanière, qui laissaient place dès le lendemain matin à la grisaille et une pluie ininterrompue. Malgré ce temps capricieux, l’évènement ne se départit pas de son succès. Pour cette dix-septième édition, pas moins de 32 fermes ont ouvert leurs portes aux visiteurs (dont onze nouvelles). Au fil des circuits découverte – Promenade en Bresse / Au cœur de la Dombes / De la Rivière d’Ain aux sentiers du Bas-Bugey / Du Bugey au Valromey, Du Revermont au Haut-Bugey – chacun a pu trouver son bonheur, échanger avec les producteurs, déguster de bons produits et faire ses emplettes. 

Debojardain, « faire de la nature avec la nature »

Installée en 2021 à Lagnieu, Déborah Jachym développe une activité maraîchère engagée dans une démarche éco-responsable (en conversion bio). Assistante administrative, commerciale et de direction pendant douze ans, elle opère un virage à 180 degrés et décide de se donner les moyens de vivre une vie épanouissante et en adéquation avec ses valeurs. « J’ai entrepris un parcours Adema* puis j’ai intégré le BPREA** à la Motte-Servolex, une formation financée par la Région. J’ai préparé mon installation en lien avec la Chambre d’agriculture et j’ai obtenu la DJA*** », explique-t-elle, tout en ajoutant avec le sourire : « pour ce qui est des terrains, ce sont eux qui m’ont trouvée. Je veux dire qu’on est venue me proposer du terrain, donc tout s’est fait simplement. » Son conjoint, René Guirao, lui aussi en reconversion professionnelle, la rejoint courant 2023. Ensemble, ils ont à cœur de proposer des variétés anciennes, « avec des saveurs, des couleurs et formes qui sortent du traditionnel ». Le couple entremêle permaculture, biodynamie et maraîchage sur sol vivant. Leur devise : « faire de la nature avec la nature ».

L’exploitation s’étend sur une surface de 4,5 ha, dont 1,5 ha de surface cultivée plein champ et environ 840 m² sous tunnels. Ici, sont cultivés tous les légumes de saison, ainsi que des framboises, figues, rubarbe, abricots et prunes. « Le but est de nous diversifier, de nous différencier et de compléter les gammes existantes. On est au cœur du respect de notre environnement, mais aussi des personnes en cultivant des légumes sains », ajoute Deborah. « A chaque fin ou début de culture, on fait un apport en fumier. Un fumier de veaux de lait, car très pailleux, d’une exploitation de Chalamont. A l’automne on ajoute des engrais verts. Et nous avons opté pour un travail superficiel du sol, inférieur à dix centimètres. » Des pratiques vertueuses que la maraîchère a à cœur de partager avec le consommateur, d’où sa participation (une première) à l’Ain de ferme en ferme : « Dès mon installation, c’est quelque chose qui m’a intéressée, pour faire connaître notre façon de faire. On est des jardiniers professionnels, on apprend constamment et nous sommes en train d’élaborer une gamme de plantes aromatiques et médicinales. » En deux ans, Déborah a su fidéliser sa clientèle : vente à la ferme les mardis, vendredis et samedis, livraison de commandes le jeudi matin. 

La Ferme de Prou : porcs sur aire paillée et vaches Aubrac

A une vingtaine de kilomètres, plus au nord, sur les hauteurs de Varambon, la Ferme de Prou ne désemplissait pas de visiteurs. Chaque année, Jérôme Jolivet et sa compagne, Agnès Coudrin, accueillent en moyenne entre 1 300 et 1 500 personnes lors des week-end l’Ain de ferme en ferme. Jérôme Jolivet, boucher de métier, s’est installé en juillet 2006 sur l’exploitation familiale, après être retourné sur les bancs de l’école et obtenu un BPREA en formation pour adultes au lycée des Sardières. Le Gaec élève aujourd’hui porcs et bovins de race Aubrac, sur une SAU de 140 ha, dont 70 ha de céréales. Un cheptel de 45 mères Aubrac, pour une centaine d’animaux avec la suite, et quelque 500 porcs à l’engraissement à l’année, sur aire paillée. Viande de bœuf, de veau (veaux élevés sous la mère), de porc et charcuterie sont vendus en direct : à la ferme, magasins de producteurs et au marché de Varambon. Durant tout le week-end, les visites commentées se sont enchaînées au Gaec. Et Jérôme Jolivet d’expliquer : « Nous transformons dans le labo à la ferme. On emploie un ouvrier en boucherie charcuterie, ma conjointe s’occupe également de la transformation et de la vente. Les Aubrac sont abattues à trois ans à environ 350 – 380 kilos. Une race qui a beaucoup de qualités : sa rusticité, facilités de vêlage, très maternelle et une bonne valorisation de l’herbe. Les porcs arrivent sur la ferme lorsqu’ils ont trois mois. Ils sont engraissés sur aire paillée avec les céréales cultivées sur l’exploitation. Ils seront abattus à sept ou huit mois à 100 kilos de carcasse. Cette année nous allons réduire la surface des céréales pour augmenter le troupeau. » 

Une viande et charcuterie particulièrement goûteuse, très appréciée des consommateurs. Depuis sa première participation à l’Ain de ferme en ferme en 2013, le Gaec propose chaque année des repas aux visiteurs (près de 400 repas servis durant le week-end). Un beau succès, mérité, reconnaissance du savoir-faire et de la passion du métier.

* Accès des demandeurs d’emplois aux métiers agricoles, dispositif national lancé en juin 2009.

** Brevet professionnel responsable d’entreprise agricole.

*** Dotation jeunes agriculteurs.

Patricia Flochon