PORTRAIT
Des vins qui nous font remonter le temps

A Vaux-en-Bugey, Maud Blache élève des vins originaux issus de cépages très anciens.
Des vins qui nous font remonter le temps

Des dizaines de cépages différents, dont certains très anciens..., c'est ce qui fait la particularité du vignoble de Maud Blache, viticultrice à Vaux-en-Bugey depuis deux ans. Une histoire particulière qui débute par la lecture d'un livre : « Dans les vignes – Chronique d'une reconversion », de Catherine Bernard, journaliste devenue vigneronne. « Je ne connaissais pas la viticulture. J'ai lu le bouquin et j'ai eu le déclic. Ça sonnait tellement juste... », explique Maud. Pourtant la jeune femme n'étais pas spécialement destinée à élever de la vigne. Après une formation dans la protection de l'environnement, avec un BTSA Gestion et maîtrise de l'eau, elle travaillera comme laborantine à la station d'épuration de la ville de Bourg-en-Bresse, puis à l'Insee (Institut national de la statistique et des études économiques). Poste qu'elle conserve aujourd'hui à mi-temps, se consacrant le reste du temps à ses vignes. Après la lecture de ce « fameux » livre, elle rencontre Jean-Christophe Pellerin, viticulteur bio à Saint-Sorlin-en-Bugey. « Sur ses conseils, j'ai contacté Raphaël Bartucci de Mérignat. On a bossé ensemble quelques heures par-ci, par-là, puis, en 2014, j'ai pris un congé individuel de formation pour préparer un BPREA vini viticulture option bio, en formation à distance au lycée agricole de Beaune. J'ai également beaucoup appris avec Raphaël », ajoute-t-elle.

Des cépages historiques locaux

La spécificité des vignes de Maud est d'être situées très en pente, plantées très serrées, avec de très vieux cépages dont certains historiques locaux. Au total, près d'1,5 ha, composé d'un ensemble de petites parcelles récupérées depuis cinq ans, jusqu'alors entretenues par des amateurs passionnés, des anciens du village pour la plupart. « Il y a deux ans, j'ai été contactée par l'Inra qui cherchait à rafraîchir le patrimoine génétique, intéressé par tous ces vieux cépages qui peuvent être aussi une solution au réchauffement climatique. On leur a signalé les vieilles vignes et ils ont découvert et identifié le fameux Ribier, qui donne du vin rouge, mais aussi de l'Abondance et du Rayon d'Or qui produisent du rouge et du blanc. Au final, une petite dizaine de cépages historiques ont été retrouvés ici », explique-t-elle, ravie de cette découverte arrivée à point nommé juste au moment de son installation. Et d'ajouter : « Je suis vraiment sur un créneau découverte et redécouverte. On a aussi les cépages hybrides qui sont encore mal aimés car ils ont une capacité de production énorme. Mais en limitant les rendements, avec des périodes estivales très chaudes, ça donne des résultats très intéressants ».

... qui donnent des vins atypiques

« Cette multitude de cépages permet de proposer toute une gamme de vins atypiques. Je ne bénéficie pas de l'AOC car mon vin n'entre pas dans des cases pré-formatées du fait des cépages et de la vinification en vin naturel », précise encore Maud, qui a travaillé avec une amie d'enfance, graphiste, sur la création d'étiquettes et de noms très originaux. Ses cépages, classiques (Chardonnay, Pinot, Gamay, Mondeuse...) et anciens, donnent deux gammes de vins avec une identité différente. Dans la gamme « classique », on retrouve Mon P'tit Blanc, avec une majorité de Chardonnay (70 %) et de l'Aligoté ; Mon P'tit Rouge qui marie Pinot (70 %) et un très vieux Gamay ; et les Ptites Bulles, un pétillant gazéifié fait à l'ancienne, réalisé avec une vigne plantée avec des cépages spécifiques. La deuxième gamme, qui invite à la découverte, se compose de trois vins aux noms inspirés de la Grèce antique : Eros, un rosé « toutes fleurs » issu de vieilles vignes composées de dizaines de cépages différents ; Agapé, un blanc de Jacquère, très ample, long en bouche ; et Philia. A la cave du Buizin, la vinification est « naturelle » : « Je ne fais qu'accompagner un processus naturel, je ne le force pas. J'ajoute juste une petite quantité de sulfites pour stabiliser. La conséquence : un vin hyper digeste et qui ne donne pas mal à la tête ! ». Des vins à retrouver à la cave située au cœur du village, en vente le samedi de 9 h à 12 h et sur rendez-vous, à des prix allant de 10 à 12 € la bouteille.

Patricia Flochon