RÉCIPROCITÉ
La France interdit les antibiotiques de croissance pour les viandes importées

Un arrêté suspend l’importation de viandes provenant d’élevages utilisant des antibiotiques pour favoriser la croissance des animaux. L’interdiction s’appliquera dans un délai de deux mois.

La France interdit les antibiotiques de croissance pour les viandes importées
La France suspend l'importation de viandes u produits à base de viande d'animaux provenant de pays tiers à l'Union européenne ayant reçu des médicaments antimicrobiens pour favoriser la croissance ou augmenter le rendement.©Reussir

C’était une mesure très attendue par les éleveurs français et européens. Un arrêté du 21 février suspend pendant un an « l’introduction, l’importation et la mise sur le marché en France de viandes et produits à base de viande issus d’animaux provenant de pays tiers à l’Union européenne ayant reçu des médicaments antimicrobiens pour favoriser la croissance ou augmenter le rendement ». Une pratique interdite dans l’Union européenne depuis 2006. L’interdiction s’appliquera dans un délai de deux mois pour donner le temps « aux opérateurs ou aux metteurs en marché de viandes provenant de produits tiers d’adapter leurs procédures », explique le ministère de l’Agriculture. Les importateurs seront tenus de collecter des informations sur la provenance des animaux, d’évaluer le « risque » qu’ils aient reçu des antibiotiques facteurs de croissance et de mettre en œuvre des « mesures d’atténuation du risque » en demandant des garanties de conformité à leurs fournisseurs.

Clause miroir

Cet arrêté national anticipe l’entrée en vigueur de l’article 118 du règlement de l’Union européenne sur les médicaments vétérinaires de décembre 2018. Ce texte européen, qui devait entrer en vigueur au plus tard le 28 janvier 2022, prévoyait l’instauration « d’une mesure miroir » sur l’interdiction de l’usage d’antibiotiques à des fins de croissance en élevage. La mise en application de cette mesure « a pris du retard, mais les textes d’application devraient arriver dans les mois qui viennent », précise le ministère. Au sein des institutions européennes, la France a « largement défendu » la mise en place de cette « mesure de réciprocité », rappelle l’entourage de Julien Denormandie. Voté quelques semaines avant le règlement européen, en novembre 2018, l’article 44 de la loi Egalim, prévoyait déjà l’interdiction de vendre ou de distribuer des aliments « ayant fait l’objet d’un traitement ou issus d’un mode de production non autorisé par les réglementations européennes ou ne respectant pas les exigences d’identification et de traçabilité imposées par lesdites réglementations ». Cependant, la France ne pouvait prononcer seule des restrictions d’importations, car la politique commerciale avec les pays tiers relève de la compétence de l’Union européenne.

Un premier pas pour les interprofessions

L’arrêté français est « une première étape, mais pas tout à fait suffisante », car « elle fait reposer le contrôle sur la responsabilité des entreprises », a déploré Yann Nédélec, le directeur d’Anvol (interprofession des volailles de chair). Anvol demande donc « une augmentation des contrôles par les pouvoirs publics ». L’interprofession souhaite aussi que cette interdiction « soit étendue » au reste de l’UE, comme prévu par le règlement de 2018 sur les médicaments vétérinaires, car « la plupart des importations de volailles ne rentrent pas directement en France, mais passent par Rotterdam », d’après Jean-Michel Schaeffer, président d’Anvol. De son côté, l’interprofession bétail et viandes Interbev a salué, dans un communiqué, « un premier pas d’intérêt majeur en faveur de la réciprocité des normes ». Son président Jean-François Guihard appelle Bruxelles à « faire preuve de responsabilité en suivant l’exemple français et en généralisant cette interdiction sans attendre ». Un rapport de la Commission européenne sur l’application des normes sanitaires et environnementales de l’UE aux produits agricoles et agroalimentaires importés est attendu d’ici juin, alors que la France a fait des clauses miroirs l’une de ses priorités pour la présidence française du Conseil de l’Union européenne.

JG, YG