CIRCUITS COURTS ET PRODUITS LOCAUX
Un forum dédié à l’alimentation locale pour « créer du lien »

Margaux Balfin
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Dans le cadre d’une réflexion portant sur l’approvisionnement local, Grand Bourg Agglomération et six autres intercommunalités ont organisé un forum dédié à l’alimentation mercredi 10 avril à la MFR de la Vernée à Péronnas. 

Un forum dédié à l’alimentation locale pour « créer du lien »
Le forum de l’alimentation locale a permis aux acheteurs et fournisseurs locaux d’entrer en relation. Photo/MB

Vers quels fournisseurs se tourner pour s’approvisionner en produits locaux, de qualité et au juste prix ? Comment organiser mes achats/ventes ? Quelles sont les contraintes logistiques auxquelles font face les chefs cuisiniers, producteurs, cantines ? Autant de questions que se posent au quotidien les restaurateurs, exploitants agricoles ou encore élus locaux pour l’approvisionnement des cantines scolaires ou Ehpad. Pour y répondre, encore faut-il que tous se rencontrent pour échanger sur leurs contraintes et attentes respectives. C’est précisément le rôle du forum dédié à l’alimentation locale qui s’est tenu le 10 avril dernier à la MFR de la Vernée, organisé par sept intercommunalités du département*. 

Un événement qui s’inscrit dans une plus large réflexion

Cet événement qui a vocation à se reproduire chaque année, n’est toutefois que la partie émergée de l’iceberg mis à flot par sept intercommunalités du département pour repenser l’approvisionnement local. « Au départ ce ne sont que des échanges informels que nous avons eus entre élus sur des questions purement logistiques en matière d’alimentation locale », explique Aimé Nicolier, vice-président en charge de l’agriculture et de l’alimentation à Grand Bourg Agglomération. À la genèse, plusieurs pistes sont explorées : plateformes logistiques, aides pour améliorer Agrilocal, ou plus concrètement la mise en place de boucles acheteurs-producteurs. « Prenons l’exemple d’un producteur d’œufs qui doit organiser sa tournée, les EPCI d’un même territoire peuvent se coordonner au niveau des cantines. C’est un travail de structuration à petite échelle », poursuit l’élu. 

Ce forum n’est autre qu’une vitrine pour « créer du lien » entre élus locaux, producteurs, représentants des chambres consulaires et de l’Adabio, gestionnaires de restauration collective. Le midi, sous un beau soleil printanier, tous ont pu converser autour d’un verre de vin du Bugey en dégustant un risotto de sorgho aux légumes de saison préparé par Christophe Rollin et ses élèves de la MFR de Pont-de-Veyle, lauréats du concours « légumineuses ». « Faire manger mieux nos concitoyens, c’est l’objectif. Il faut manger local et meilleur, avec moins de gaspillage. Il faut améliorer l’approvisionnement local et la rémunération des producteurs ainsi que la reconnaissance de l’agriculture », soulignait entre autres Michel Joux, président de la Chambre d’agriculture, partenaire de la démarche. 

Concilier prix et rémunération 

Comme sur tout marché, c’est le nerf de l’approvisionnement. Que ce soit dans le cadre de discussions plus décontractées ou durant les tables-rondes qui se sont déroulées tout au long de la journée, la question du prix de vente et de la rémunération des producteurs s’immisce dans tous les échanges. Une fierté dont ne se départit pas l’association Viande des Pays de l’Ain qui commercialise du bœuf né, élevé et abattu dans l’Ain en pratiquant un prix d’achat à ses 65 éleveurs arrêté par l’interprofession. « Aujourd’hui, certains labels garantissent une qualité aux consommateurs mais pas de prix pour les éleveurs », soulignait Sandra Lagnieu, chargée de développée à VPA. Et Hugo Danancher, son président et éleveur de charolaises à Saint-Bénigne, de marteler : « Viande des Pays de l’Ain est la seule à respecter la loi Egalim ». 

Toutefois pour Matthieu Venet, de la Boulangerie Bio Matt the baker à Viriat, acheter du local ne veut pas dire acheter plus cher. « J’achète du morbier et du comté directement à Aromas et moins cher que chez Métro. La seule contrainte c’est d’anticiper un peu de trésorerie, mais le delta prix ne permet pas de fermer tout de suite la porte à ce marché. Ça vaut le coup de se renseigner et de bosser la recette », insiste-t-il. Un constat partagé par Dominique Coiffard, chef-cuisinier au Parc des oiseaux à Villars-les-Dombes. Depuis quelques temps, il a fait le choix d’écarter certaines marques de bières ou de soda au profit de bières et produits locaux (steaks hachés Viande des pays de l’Ain, produits de la ferme Désiris et laiterie de la Côtière entre autres). Il admet toutefois qu’étant dans la restauration commerciale, il lui est plus facile de répercuter sur ses prix que dans la restauration collective, soumise à des budgets plafonnés. Et Aimé Nicolier d’avancer en marge du forum : « Sur la rémunération, je pense que nous devrons aller plus loin en tant que collectivité, notamment lorsque nous avons des commandes régulières, cela pourrait faciliter l’installation d’agriculteurs et producteurs. »

Les plateformes pour simplifier la logistique

Mais la question du prix n’est pas la seule variable d’ajustement en matière d’achats/fournitures. Nombreux sont ceux qui se heurtent à des contraintes logistiques. En témoigne Hugo Danancher : « J’ai développé la vente directe sur mon exploitation en 2016 un an après mon installation et je me suis vite rendu compte que c’était très compliqué d’être à la fois éleveur, boucher, logisticien, commercial, comptable, et VPA permet de décharger l’éleveur de cette partie logistique. » Pour atteindre l’équilibre carcasse, l’association vend par exemple certains morceaux plus difficiles à écouler sous forme de steaks hachés 

Beaucoup se tournent aussi vers des plateformes telles que Agrilocal. Après la reprise à la suite du confinement, le parc des oiseaux s’est vu dans l’obligation de monter en urgence un fast-food pour permettre aux visiteurs de se restaurer debout. « Je me suis tourné vers Agrilocal. Avant il n’y avait que 10 à 15 % de notre approvisionnement qui venait de l’Ain, aujourd’hui c’est 60 % qui vient du département et de la Région », explique Dominique Coiffard. D’autres comme Nelly Chidichimo, du restaurant l’Entracte à Bourg-en-Bresse, reviennent aux bonnes vieilles méthodes en se fournissant directement chez le producteur. Plusieurs fois par semaine elle achète ainsi son pain chez Matthieu Venet. Le moyen pratique de changer de produits selon ses goûts et envies du moment tout en garantissant une publicité gustative pour le boulanger. Une relation gagnant/gagnant. 

 

*Dombes, Veyle, Plaine de l’Ain, Rives de l’Ain pays de Cerdon, Miribel et Plateau, la Côtière et Grand Bourg agglomération, , en partenariat avec l’Adabio, les trois chambres consulaires, le Département de l’Ain, Saveurs de l’Ain et Agrilocal 01.

Un marché de producteurs

Du Bleu de Gex de la fromagerie de l’Abbaye de Chézery-Forens, aux miels des Abeilles de Mélonia à Confrançon en passant par les yaourts des Délices bressans de Courtes, ou le bœuf Viande des Pays de l’Ain, plusieurs producteurs locaux adhérents Saveurs de l’Ain ou référencés sur la plateforme Agrilocal, étaient également présents pour mettre en valeur l’artisanat culinaire aindinois. Parmi eux, Émeline de Hestia Biscuiterie, installée depuis septembre 2022 à Saint-Paul-de-Varax. Cette passionnée de mythologie ancienne et de la déesse du foyer Hestia mettait à l’honneur les recettes de biscuits de sa grand-mère qu’elle a revisitées avec des produits meilleurs pour la santé et locaux : langues de chatons, sablés gourmands, ou encore ses fameux mika-choco et country-choc. La jeune femme se fournit notamment en farines et blé anciens auprès de l’Atelier de Niermont à Bâgé-Dommartin et du Moul’Ain des Fourmy à Pizay. Elle vend également ses produits en local, chez différents magasins revendeurs : la Ferme du séminaire à Servas, l’Épicerie des Dames à Neuville-les-Dames ou encore chez Nathalie à Sulignat. Ce type d’événements lui permet de se faire connaître auprès des élus locaux et de créer de nouvelles relations.