ÉLEVAGE
Ferme du Trèfle : concentré d’innovations et filière vertueuse

Patricia Flochon
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À Vandeins un projet innovant voit le jour. La Ferme du Trèfle a priorisé le confort des animaux et des hommes : végétalisation, traitement innovant de l’eau, de l’air, système de contention sans contraintes, robotisation de l’alimentation, automatisation du paillage, gestion innovante des lisiers, séchage en grange avec captage solaire… Explications.

Ferme du Trèfle : concentré d’innovations et filière vertueuse
Jérôme Curt et Camille Olier, responsable du développement technique et commercial de la ferme. Photo/PF

Éleveur de bovins de race Angus depuis 2009, Jérôme Curt ne tarit pas d’éloges pour la race dont il vante les mérites : « sa grande facilité de vêlage ; sa morphologie, marquée par des canons courts et une attention particulière sur la rectitude et la longueur du dos. Une race génétiquement sans cornes. Des animaux carrés, trapus, avec des bassins larges facilitant les vêlages ; au caractère tranquille, avec un instinct grégaire très développé ; et la très bonne valorisation des animaux sur des marchés de niche. Les vaches enregistrent de 650 à 850 kg de poids vif et les taureaux de 900 à 1 300 kg ». Président de l’association Aberdeen Angus France, il concrétise aujourd’hui un projet remarquable, mûri durant près de sept ans de réflexions, de visites et de recherches multi partenariales en lien avec des experts techniques, financiers et juridiques. La conception, pluridisciplinaire, a été mise en place avec l’appui de HRA (cabinet d’architecture basé à Mâcon), Tanguy Morel et Camille Olier, alors tous deux conseillers bâtiments à la chambre d’agriculture de l’Ain en 2016. Un projet « centré autour d’une filière vertueuse qui consolide l’élevage local, valorise et entretient durablement le territoire, organisée avec un objectif de bien-être animal à chaque stade de sa vie ». Sur le site de la Ferme du Trèfle, les premiers coups de pelle ont été donnés en décembre 2021, pour une mise en service des nouveaux bâtiments en octobre prochain. La stabulation historique, destinée à l’affinage des Angus et charolaises, reste en activité. Elle a été pourvue d’une extension, pour arriver aujourd’hui à un total de 170 places. 
 
Des bâtiments innovants et végétalisés
 
La construction du nouveau bâtiment d’affinage est en passe d’être terminée, soit 256 places supplémentaires sur le site. Une stabulation couplée à un nouveau bâtiment de séchage en grange pourvu de quatre cellules de séchage, équipée de deux quais de déchargement à chaque extrémité. La toiture Sud a été construite en panneaux photovoltaïques, permettant de récupérer à la fois la chaleur des panneaux et du toit. La ferme a également investi dans un séparateur de phase (gestion innovante des lisiers) couplé à une poche pour stocker la phase liquide. Et Camille Olier d’expliquer : « Le bâtiment d’affinage a été pensé pour le bien-être animal, des hommes qui y travaillent et des sols, avec des rideaux double enroulement pour la ventilation naturelle, pilotés par station météo qui prend en compte la température, l’hygrométrie et le vent. Des ventilateurs (un par case) sont couplés avec une sonde de température intérieure. Un système de Pad Cooling a été prévu pour rafraîchir l’air dans le bâtiment. La toiture, en bartic, permet une rupture de pont thermique. Chaque case est équipée de brosses pour le confort des animaux, et de bacs à eau de grande contenance alimentés par de l’eau traitée avec le système Natur’Aqua ». La végétalisation tient une place prépondérante dans le projet : séparations végétalisées entre les cases avec des essences locales (noisetier, acacia…) et des massifs installés au milieu de chaque case. Autres points forts du projet : un système d’éclairage par LED (économie d’énergie), deux robots d’alimentation pour dégager du temps avec les animaux, un paillage quotidien automatisé (paille hachée et dépoussiérée), deux racleurs automatisés reliés au séparateur de phase. Ainsi qu’une cage de contention hydraulique fixe, et aucun cornadis mais un système de tubes verticaux, pour un confort optimal des bovins. 
 
Création d’une filière d’approvisionnement en bovins
 
Le projet prévoit la production et la distribution « de viandes de qualité à haute teneur nutritive, en valorisant notamment des veaux croisés des cheptels de vaches laitières Montbéliardes et Angus et en valorisant une viande bovine locale ». La Ferme, labellisée Saveurs de l’Ain, fournit déjà une vingtaine de collèges en steaks hachés « façon bouchère » via la plateforme Agrilocal, ainsi que des boucheries traditionnelles, restaurateurs et une clientèle de particuliers (caissettes). À propos du croisement Angus et Montbéliardes, Jérôme Curt explique : « Nous avons des partenariats gagnant-gagnant avec des coopératives : Franche-Comté Elevage pour la Montbéliarde, avec Feder (anciennement Gecsel) pour la Charolaise. On fait faire des veaux croisés par des éleveurs partenaires qui trouvent un intérêt dans le croisement. À partir d’octobre nous récupérerons les animaux, de 14 à 16 mois, issus de croisement, qui resteront 120 jours dans les bâtiments ». Avec ce projet de filière et le déploiement de solutions innovantes dans les bâtiments, la Ferme du Trèfle fera figure de référence. Investissement total : 5,6 M€. Un cercle vertueux qui a retenu l’attention du ministère, avec à la clé un subventionnement à hauteur de 40 % (sur 5 M€) dans le cadre du Plan de relance. Et Camille Olier d’ajouter : « On veut faire de ce site un site pédagogique ; recréer du lien entre le consommateur et les éleveurs, à destination des scolaires également. Avec l’organisation d’ateliers, d’Eductour en lien avec les offices de tourisme, l’accueil d’étudiants en agriculture et groupes d’éleveurs. L’idée, c’est vraiment de faire de la formation et du partage, avec également l’Institut de l’élevage et différents organismes agricoles ».