L’AVIS DES PARLEMENTAIRES
Députés et sénateurs attendent une application concrète des annonces gouvernementales

Margaux Balfin
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Certains se sont déplacés sur les blocages, d’autres non. Par choix ou par indisponibilité, à chacun son style, à chacun sa forme. Député comme sénateur, tous groupes politiques confondus, les parlementaires du département parlent du reste d’une seule voix pour manifester leur appui à la profession agricole. 

Députés et sénateurs attendent une application concrète des annonces gouvernementales

Certains se sont déplacés sur les blocages, d’autres non. Par choix ou par indisponibilité, à chacun son style, à chacun sa forme. Député comme sénateur, tous groupes politiques confondus, les parlementaires du département parlent du reste d’une seule voix pour manifester leur appui à la profession agricole. Des mots dont certains regrettent parfois qu’ils ne s’accompagnent de geste. À l’instar d’Olga Givernet, députée de la majorité, dont l’absence sur le blocage de Collonges, dans sa circonscription, a été remarquée. Alors sur les bancs de l’Assemblée nationale, elle ne pouvait être à deux endroits en même temps, regrette-t-elle. 

O. Givernet : vers un projet de loi de finances rectificatif ?

Des mobilisations historiques, Olga Givernet en retient surtout des annonces gouvernementales historiques. « Nous sommes en train de refondre complètement le secteur agricole », se réjouit-elle. Ces annonces ne seraient donc pas le fruit d’un Gabriel Attal acculé ? Loin s’en faut, s’indigne la porte-parole du groupe Renaissance à l’Assemblée nationale : « Je ne peux pas laisser dire que rien n’a été fait sur l’agriculture. On s’y attache depuis 2017. Sur la question de la juste rémunération entre autres, il y a eu trois lois EGAlim. Des choses ont été faites, qu’elles ne fonctionnent pas, c’est autre chose. » Quid des contrôles de la grande distribution ? « On pourrait espérer qu’il y ait moins besoin de contrôler. Nous n’aurons pas les moyens de financier un contrôleur derrière chaque enseigne ou chaque agriculteur. L’objectif, c’est d’avoir un système intelligible », souligne la porte-parole. Sur la question du GNR, Olga Givernet dit comprendre les enjeux pour la profession agricole. « La profession doit aussi comprendre l’effort qui est fait à l’heure où nous avons la volonté de sortir des énergies fossiles », ajoute-t-elle. 

Questionnée sur les solutions du gouvernement pour faire appliquer et financer les mesures annoncées par le Premier ministre, Olga Givernet le concède, « certaines mesures devront repasser par la case législative. De même pour les moyens budgétaires, vis-à-vis de ce qui est aujourd’hui prévu par les enveloppes ». D’après la députée, cela pourrait même conduire à un projet de loi de finances rectificatif. 

D. Abad plaide pour une Cour des comptes agricole

S’il ne s'est pas non plus rendu sur les blocages, Damien Abad (apparenté Renaissance) a échangé plusieurs fois avec les élus syndicaux durant les mobilisations : « Mon objectif, ce n’est pas de faire un selfie à côté du tracteur. J’ai échangé directement avec Michel Joux. » Le député de la cinquième circonscription salue lui aussi les annonces de Gabriel Attal, mais attend des actions concrètes quant à leur application. Pour l’élu, l’enjeu numéro un reste la rémunération des agriculteurs. Peu convaincu par l’Observatoire des prix et des marges, Damien Abad lui préférerait la création d’une Cour des comptes agricole pour mieux contrôler et sanctionner les dérives vis-à-vis de la loi EGAlim. Le député entend également porter plusieurs amendements en faveur d’une levée de la fiscalité ponctionnée sur la transmission des exploitations. De manière générale, il souhaiterait que la profession soit associée et consultée à l’écriture des décrets d’application. 

F. Blatrix demande de commission d’enquête sur les revenus

Tout aussi dubitative sur la capacité d’évaluation de l’Observatoire des prix et des marges, la sénatrice (PS) et son groupe ont récemment déposé une demande de commission d’enquête sur les revenus et marges agricoles. Elle devrait être évaluée lors de la prochaine conférence des Présidents. « Il nous faut la vérité. Il y a eu trois lois EGAlim et les problèmes ne sont pas réglés. Sur les marges, on voit bien que la grande distribution et l’agroalimentaire se rejettent la faute mutuellement et que ce n’est pas si clair », précise-t-elle. Attentive aux mesures avancées par Gabriel Attal, Florence Blatrix espère qu’elles ne se résumeront pas à des effets d’annonce. 

X. Breton et son groupe présentent un Livre blanc 

Le député (LR) de la première circonscription s’est rendu à Beynost, le 25 janvier dernier, pour rencontrer la profession dès le premier jour des mobilisations aindinoises. Il tenait à exprimer son soutien aux agriculteurs. Lui aussi voit d’un bon œil les annonces gouvernementales, mais au-delà des discours, Xavier Breton attend des actions concrètes. Le député place de hautes espérances dans la loi d’orientation agricole (LOA) avec des mécanismes de contrôles plus aboutis, que ce soit en matière de fixation des prix ou d’étiquetage. « Il faut aussi que l’on arrête d’être sous la pensée unique des écologistes radicaux. Ce qui a bien changé c’est qu’on se rend compte que les discours des écolos radicaux nous conduisent dans le mur. On l’a vu avec l’énergie. Ce changement d’état d’esprit, il faut aussi qu’il se traduise non pas avec des normes contraignantes mais avec de l’accompagnement. »

P.Chaize : pour une rémunération au coût de production

S’il ne s'est pas rendu sur les blocages, le sénateur (LR) a longuement échangé avec les élus syndicaux. « Je rencontre régulièrement les OPA, ce sont toujours les mêmes sujets qui ressortent : la rémunération, la réglementation … La seule solution que l’on ait, c’est d’avoir un contrôle par un observatoire des prix qui fonctionne », insiste Patrick Chaize. Pas de concession possible, pour l’élu, l’enjeu, c’est la rémunération au coût de production :  « Il faut sanctuariser un seuil de rémunération au coût de production pour que l’agriculteur ne soit pas pris dans le tourniquet des négociations commerciales qui doivent se faire dans un second temps. » Patrick Chaize appelle à une véritable application des clauses miroir et à ce que des solutions de substitution soient proprosées aux agriculteurs lorsque certaines pratiques ou substances sont interdites. 

J. Buisson vent debout contre les accords de libre-échange 

Le député (RN) de la quatrième circonscription a quant à lui rencontré les agriculteurs sur le blocage de Villefranche/Limas. « J’ai attendu une semaine pour avoir les premières annonces du gouvernement », confie-t-il. À quelques mois des élections européennes le député rappelle les positions de son groupe politique, vent debout contre les traités de libre-échange. « Nous ne les aurions pas signés », résume-t-il. Plus proche idéologiquement de la Coordination rurale, le député regrette que la FNSEA/JA aient lâché trop vite les blocages. « La mobilisation continue dans les autres pays, et les agriculteurs avaient le soutien de la population. Je pense que c’est dangereux pour eux d’avoir levé si vite les blocages. »

S. Goy-Chavent attend du concret 

La sénatrice (LR) s’est, elle aussi, rendue sur le blocage du péage de Villefrache-sur-Saône. Fille d’agriculteurs, elle entend ces revendications depuis des décennies. « À chaque fois, c’est beaucoup de saupoudrage, mais les mesures ne vont pas au bout… », regrette-t-elle. « Je pense beaucoup à eux en ce moment parce que c’est le moment des vêlages et des agnelages, ils doivent se faire du souci. Je  ne sais pas si les gens se rendent compte des sacrifices que font les agriculteurs. » Comme ses pairs, Sylvie Goy-Chavent espère que les annonces de Gabriel Attel se concrétiseront sur le terrain. 

R. Daubié s’est rendu à Beynost 

Député (LR) de la deuxième circonscription, il a été l’un des premiers à se rendre sur les points de blocage, jeudi 25 janvier à Beynost. « Je n’ai pas découvert le monde agricole avec les manifestations de la semaine dernière. C’est une manière d’afficher mon soutien. » L’ancien maire de Montluel rappelle avoir pris une résolution contre le Mercosur et avoir alerté Bruno Le Maire sur le GNR, la taxe de l’Agence de l’eau. « Dans un monde idéal, il eût fallu que le monde agricole et les élus comme moi soient entendus avant qu’il n’ait été besoin de bloquer les autoroutes. »