BIODIVERSITÉ
Concours prairies fleuries : récompenser la valeur agronomique d’une parcelle

Ludivine Degenève
-

Voilà huit ans que la Chambre d’agriculture de l’Ain organise le concours général agricole des pratiques agroécologiques prairies et parcours. Dans le Département, quatre parcelles se disputent la première place. Le jury s’est rendu sur le terrain le 24 mai pour déterminer laquelle des quatre prairies auraient l’opportunité d’être sélectionnée pour le concours national. 

Concours prairies fleuries : récompenser la valeur agronomique d’une parcelle
Le jury s’est rendu sur chaque parcelle, pour l’analyser selon des critères bien précis, le tout pour savoir si elle mérite de remporter le premier prix local, et ainsi voir son dossier sélectionné pour le concours national. PHOTO/ LD

Mettre en avant les prairies avec le meilleur équilibre agroécologique, tel est l’objectif du concours général agricole des pratiques agroécologiques prairies et parcours. Dans l’Ain, le concours a eu lieu le 24 mai aux alentours de Saint-Bénigne. Quatre parcelles étaient en compétition pour remporter le premier prix local, qui sera décerné en fin d’année. Le dossier du lauréat sera ensuite envoyé au concours national, dont les résultats seront annoncés lors du Salon de l’agriculture 2024. Et pour avoir la meilleure expertise possible, un jury de qualité est de rigueur. Des représentants d’Acsel conseil élevage, du Conservatoire d’espaces naturels Aura et de Natura 2000 se sont prêtés au jeu et examiné les parcelles en se basant sur des critères bien précis : la fonctionnalité agricole, la productivité, la valeur alimentaire, la souplesse d’exploitation et la saisonnalité de la végétation, la fonctionnalité écologique, le renouvellement de la diversité générale, et la valeur apicole.
Le concours a débuté avec la parcelle de Thibaut Colin, du Gaec du Moulin Varret à Arbigny. L’exploitation est en élevage bovins viande de 700 charolaises. La parcelle en lice est un terrain de 12 ha, principalement utilisée pour la récolte et le pâturage. D’après la Chambre d’agriculture, elle fournit du bon foin de façon régulière et en quantité, avec des rendements attendus plus hauts que sur des parcelles plus éloignées de la route. « J’ai choisi de faire concourir cette parcelle car elle produit beaucoup en qualité et en quantité, explique Thibaut Colin. L’objectif de cette parcelle est d’avoir le plus de rendements possibles, notamment en foin, et de viser l’autoconsommation. »
 
Anne-Cécile Vallot : première femme à concourir  
 
Après 45 minutes d’attention minutieuse sur la faune et la flore du milieu, le jury est unanime : une belle diversité des graminées est observée, mais peut-être un peu trop à leur goût. Le rapport graminées / légumineuses est assez déséquilibré. Ce phénomène est dû à un taux d’azote trop important lié à la pratique abusive du pâturage, ce qui surcharge la prairie d’engrais. Et pour cause : tous les quatre ans, le Gaec du Moulin Varret répand du fumier sur la parcelle à hauteur de 20 t/ha. Malgré ce bémol, des points positifs sont cependant à noter. Quelques espèces rares ont été repérées, comme le Cuivré des marais, un papillon orange à taches noires. « On n’en voit pas beaucoup sur le Val de Saône », explique Charline Pierrefeu, interlocutrice pour les sites Natura 2000 sur le secteur de la Saône.
Le jury a poursuivi sa route vers la parcelle de 10 ha d’Anne-Cécile Vallot, du Gaec des Orchis à Saint-Bénigne, qui est d’ailleurs la première femme à participer au concours des prairies fleuries depuis sa création. L’exploitation est en élevage bovins lait avec 130 Montbéliardes dont 60 en production. Contrairement à la parcelle précédente, aucune intervention n’est réalisée par rapport à l’engrais, ce qui diminue le taux d’azote, et donc favorise la diversité au sein de la prairie. « Il y a une bonne faune et flore », lance Marie Valentin-Auzou, conseillère agroécologie et biodiversité à la Chambre d’agriculture de l’Ain, après avoir vu bon nombre de chenilles et de papillons.
Beaucoup moins de graminées ont été observées par rapport à la première parcelle, mais les espèces végétales sont beaucoup plus nombreuses : les experts en comptent entre 30 et 35. Le jury a également trouvé plusieurs sortes de fleurs rares, signe d’un bon équilibre entre l’engrais et la fauche. Pour garder cette qualité, « il faut continuer d’utiliser la pratique de fauche, ne pas trop fertiliser, et ne pas avoir un pâturage trop important », précise Charline Pierrefeu.
Depuis son lancement dans l’Ain en 2015, la compétition se passe dans le Val de Saône « parce qu’il y a une cohérence agronomique, explique Marie Valentin-Auzou. C’est une zone Natura 2000 car il y a beaucoup d’oiseaux rares. » La conseillère explique également qu’un territoire précis est choisi pour ne pas comparer l’incomparable : « On ne peut pas évaluer une prairie humide de plaine avec un territoire sec en altitude. »