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« Lorsqu’on change de rotation de cultures, la réduction de l’IFT est plus forte »

Le colloque inter-régional Dephy Auvergne-Rhône-Alpes et Provence-Alpes-Côte d’Azur aura lieu le 24 novembre prochain, à Eurre (Drôme). Philippe Blondeau, membre du comité technique du colloque et ingénieur territorial Dephy grandes cultures polyculture-élevage (GCPE) Auvergne-Limousin, revient sur les enjeux de la réduction des produits phytosanitaires.

« Lorsqu’on change de rotation de cultures, la réduction de l’IFT est plus forte »
Philippe Blondeau, ingénieur territorial Dephy grandes cultures polyculture-élevage (GCPE) Auvergne-Limousin à la chambre d'agriculture Nouvelle-Aquitaine.

Le colloque inter-régional Dephy aura lieu d’ici quelques jours. De quoi s’agit-il ?

Philippe Blondeau : « Il s’agit de la déclinaison régionale du colloque national qui s’est tenu le 2 février 2021 en format 100 % digital et interactif. Lors de ce colloque inter-régional qui aura lieu le 24 novembre à Eurre dans la Drôme nous présenterons les résultats technico-économiques des fermes Dephy en grandes cultures et polyculture-élevage (GCPE) de la région Aura et Paca. J’animerai cette matinée avec Célia Creff, mon homologue pour la zone Rhône-Alpes Paca. L’objectif de cette journée, c’est de présenter les différentes techniques ayant permis de faire évoluer positivement l’indice de fréquence de traitement (IFT) dans les fermes, le tout accompagné de témoignages d’agriculteurs et de conseillers. Concrètement, dans la région Aura, pour le réseau grandes cultures et polyculture-élevage, 160 agriculteurs se sont impliqués au sein de seize groupes et treize structures différentes : l’Adabio, la Maison François Cholat, le négoce Centre-Est, la Sarl Savoy Grain les chambres d’agriculture de Savoie-Mont-Blanc, Ain, Allier, Cantal, Drôme, Isère, Loire, Haute Loire et Puy-de-Dôme. »

Quels leviers agronomiques ont été actionnés pour améliorer l’IFT et les performances technico-économiques des fermes Dephy ?

P.B. : « Chaque conseiller a pu accompagner les agriculteurs et agricultrices dans une approche différente selon leurs objectifs personnels, corrélés aux objectifs de leur groupe. Parmi les techniques qui ont été testées, on retrouve l’allongement et la diversification des rotations de cultures. S’ils avaient, par exemple, une parcelle en rotation colza-blé-orge, ils ont pu y intégrer du méteil (ndlr, mélange de céréales et de protéagineux) ou bien des prairies temporaires ou d’autres cultures intéressantes d’un point de vue agronomique pour le système. Ils ont aussi testé le désherbage mécanique pour moins avoir recours aux herbicides, aussi bien en blé et orge qu’en maïs et tournesol. Les deux autres leviers qui nous ont semblé utiles d’explorer, ce sont la gestion des faux semis et l’usage de variétés plus rustiques et moins productives. Les solutions de biocontrôle ont aussi été appliquées pour réduire l’usage des fongicides. »

Quels résultats concrets ressortent-ils de ces groupes expérimentaux ?

P. B. : « Tous les ans, l’itinéraire cultural de chaque agriculteur est enregistré dans le système de référencement Agrosyst. Nous avons analysé les données technico-économiques de 107 systèmes culturaux lors de leur entrée dans le réseau en 2010, 2012 ou 2016 et nous les avons ensuite comparés à la moyenne des résultats des campagnes 2017-2018-2019. Nous constatons une baisse d’IFT de 28 % soit plus de 0,5 point pour la filière GCPE, des tendances très proches de celles du national. Ce que nous pouvons dire, c’est que pour les systèmes de cultures qui changent de rotation, la réduction de l’IFT est beaucoup plus forte que pour les autres. Nous constatons aussi l’augmentation de la marge semi-nette plus importante pour ces mêmes systèmes. Cela ne veut pas dire que ceux qui ne changent pas de rotation n’ont pas de résultats mais c’est avec les changements de rotation qu’on observe les résultats économiques les plus intéressants. »

Une nouvelle campagne se prépare à partir de janvier 2022. Comment se présente-t-elle ?

P. B. : « À partir de janvier 2022, nous repartons sur un nouveau cycle de cinq ans dans lequel le budget global alloué à Ecophyto devrait rester constant (NDLR, il est à 41 M€ depuis plusieurs années). Des baisses sont néanmoins attendues pour certaines actons historiques et structurantes (bulletin de santé du végétal (BSV), animation, communication) mais elles seront sûrement réaffectées via des appels à projets de recherche/expérimentation liés à la santé ou à l'enseignement. L’objectif maintenant c’est d’aller vers le transfert et la massification de nos données, en s’appuyant sur nos agriculteurs les plus volontaires et expérimentés actifs dans les réseaux depuis sa création en 2010. À l’époque, c’étaient les structures qui sollicitaient les agriculteurs. Dix ans plus tard, c’est souvent eux qui viennent à elles ! »

Propos recueillis par Alison Pelotier