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Concours de labours : passer de l’autre côté du miroir

Ludivine Degenève
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Depuis septembre, Jérôme Maure, agriculteur à Châtenay, est aussi devenu membre du jury national aux concours de labours. Retour sur sa première expérience en tant que juge aux championnats de France d’Outarville et sur son vécu en tant qu’habitué des compétitions. 

Concours de labours : passer de l’autre côté du miroir
Cette année, Jérôme Maure était juge au championnat de France d'Outarville le 11 septembre dernier. Crédit photo/ JA01

Depuis peu, Jérôme Maure est passé « de l’autre côté de la ligne ».  Cet agriculteur de Châtenay est, depuis septembre, membre du jury national aux concours de labours. « On n’a plus de jury national au niveau de l’Ain depuis 4-5 ans, explique Jérôme Maure. Je pense qu’on est le département le plus titré en champions et doubles champions. Je ne trouvais pas très logique de ne pas avoir de représentant de l’Ain au niveau national. »
C’est donc pour honorer les couleurs du département que Jérôme Maure a proposé son dossier au Jeunes agriculteurs régionaux puis nationaux. Le dernier mot a finalement été rendu par le jury national lui-même. Et cette décision, la nouvelle recrue est loin de la regretter. « J’ai eu la chance d’être jury national et d’avoir un champion de France de l’Ain cette année-là », explique-t-il fièrement. En effet, lors des derniers championnats de France de labours, qui se sont déroulés à Outarville le 11 septembre, le premier prix en planches a été décerné à l’Aindinois Steve Raccurt.
 
« On voit beaucoup de choses quand on est derrière »
 
Pour Jérôme Maure, faire partie du jury national lui permet aussi de se rendre compte des principaux points faibles des laboureurs, difficilement observables du haut du tracteur.  « Tout concurrent arrive à peu près à faire son classement quand il arrive en bout de parcelle. Mais on voit beaucoup de choses quand on est derrière. Quand on juge on peut voir des traces de roue qui ne doivent pas être au milieu de la parcelle. La profondeur est aussi difficile à déterminer quand on laboure », explique-t-il.
Passer jury national permet aussi de se faire une idée de la préparation des laboureurs et de la motivation d’un département à l’autre. « Il y a des jeunes qui ont été envoyés au casse-pipe, se désole Jérôme Maure. Quand ils arrivent à faire une grande courbe sur la parcelle, […] au point de gêner les voisins, c’est là qu’on se pose des questions. On en a vu un cette année il a fait une sacrée banane, en ouverture en plus, et il l’a continuée après. »
Pour Jérôme Maure, le maître mot d’un concours de labours c’est la convivialité, l’aspect familial qui émane de ces évènements. Et il compte bien préserver cette valeur en tant que juge national. « Avant le concours, c’est bien de leur [les concurrents, NDLR] mettre un petit mot d’encouragement. Il faut rester proche des gens », certifie-t-il. Et cette solidarité est aussi présente entre les laboureurs. « Quand tu es concurrent, tu fais le tour des parcelles avec d’autres candidats. Nous on a toujours été comme ça avec mes collègues : on est concurrents que pendant le concours, après on est copain », continue-t-il.
 
Une passion de longue date 
 
Si devenir membre du jury national est une nouvelle expérience pour Jérôme Maure, le milieu du labour est loin de lui être inconnu. « J’ai commencé, je devais avoir 11 ans. J’ai fait deux finales régionales et une finale nationale en 2009, en planches, j’ai fini  deuxième », se remémore-t-il. Et sa passion est une affaire de famille. « Mon père a déjà fait le championnat de France, son cousin a été deux fois champion de France, ma cousine a aussi été championne de France et mon cousin vice-champion de France », énumère Jérôme Maure. Âgé aujourd’hui de 46 ans, il ne peut plus faire les concours de labours cantonaux, départementaux régionaux et nationaux, mais cela ne l’empêche pas de se rendre le plus souvent possible aux compétitions. « J’ai toujours suivi les concours de labours, je n’ai pas loupé beaucoup de finales nationales », certifie l’exploitant.
Les 21 et 22 septembre derniers, il s’est rendu jusqu’en République d’Irlande avec des amis à l’occasion des championnats du monde de labours. « Ça nous permet de voir du bon travail, parce que c’est encore un niveau au-dessus », explique Jérôme Maure. Mais la casquette de juge national n’est jamais bien loin. « On faisait notre classement à part, et on voyait quand le jury annonce les résultats, si on avait le même point de vue. »
Bien que Jérôme Maure se passionne des concours de labours, au point de traverser le globe pour des compétitions européennes et mondiales, l’objectif de devenir jury à l’échelle internationale peut être freiné par un obstacle de taille. « Pour être jury aux mondiaux, il faut savoir parler anglais, ce n’est pas trop mon cas », s’amuse-t-il.

Le jury national en quelques points

Il n’y a pas de critère spécifique pour être membre du jury national. Le candidat doit monter un dossier et le présenter aux Jeunes agriculteurs régionaux, puis nationaux. Mais la décision finale revient aux membres du jury national en personne.
Le jury est composé à 50 % de laboureurs, l’autre moitié étant des personnes extérieures au milieu, comme des techniciens, des journalistes, etc.
Un membre du jury national ne peut couvrir que les championnats de France. Il lui est cependant demandé une fois par an d’être président du jury d’une finale régional hors de sa région, en binôme avec un autre juge national.
Il n’y a pas de mandat, un membre du jury garde son titre jusqu’à ce qu’une autre personne veuille prendre sa place. 

Description de l’exploitation
En plus d'être jury national, Jérôme Maure est agriculteur à Châtenay. Crédit photo/ LD

Description de l’exploitation

Jérôme Maure est agriculteur sur la commune de Châtenay. Installé en polyculture, il possède 220 ha de cultures : blé, maïs, orge, colza, tournesol et soja. Avec son salarié et son apprentie, ils s’occupent également de 80 montbéliardes en vaches laitières.