PETITION
le dialogue semble impossible. L’impossible dialogue

44 000. C’est le nombre de signatures obtenues par une pétition en ligne, lancée en décembre, pour dénoncer les tours en calèche proposés dans la ville préfecture pendant les fêtes. Entre des militants véganes d’un côté, l’éleveur et la ville de Bourg de l’autre,
le dialogue semble impossible. L’impossible dialogue

A l'origine de cette pétition, Meryl Pinque, militante végane revendiquée originaire de Bourg-en-Bresse.
« Je me trouvais dans une boutique non-loin de la cathédrale Notre Dame quand j'ai vu ce cheval harassé, transportant dix personnes installées dans un tombereau. C'était atroce », commente la pétitionnaire, qualifiant au passage le travail de ces chevaux « d'esclavage. »
De quoi chambouler Martial Druguet, éleveur des attelages de la Dombes, qui assure cette prestation à la demande de la ville depuis plusieurs années et reste abasourdi par ce qu'il considère comme une méconnaissance de la nature des animaux. « Quand ils nous voient arriver au pré, les chevaux viennent en courant. On s'occupe d'eux, on les panse... Nos chevaux, on les bichonne », assure l'agriculteur passionné.
« Le premier cheval que j'ai eu, c'était une jument que l'on destinait à l'abattoir. Je l'ai achetée en 1996 et je l'ai toujours. Il y en a plusieurs comme cela que j'ai sauvées de l'abattoir. La plupart de mes chevaux (une trentaine de chevaux de trait dont une douzaine attelée) ont une hstoire », explique le cocher.
« Ce n'est pas contre l'Attelage des Dombes que j'en ai. Ils ne font que répondre à une demande. Mais c'est contre le maire et la ville de Bourg. »
La municipalité n'en est pas à sa première pétition. En 2018, des antispécistes locaux avaient dénoncé les conditions de vie des poneys présents sur la foire de la St-Martin. Ce début d'année, une nouvelle pétition en ligne a été lancée contre le gazage des pigeons. Le plan de stérilisation des chats errants suscite aussi des oppositions.

La ville juge cette polémique « ridicule »

« C'est ridicule », commente Baptiste Monod, directeur de cabinet du maire, Jean-François Debat.
« Lorsque nousmettons en place une animation, nous sommes très vigilants sur la façon dont le prestataire traite les animaux. Cela fait très longtemps que nous travaillons avec les Attelages de la Dombes. Ces éleveurs prennent grand soin de leurs animaux. Leurs chevaux sont issus de races qui sont adaptées à ces prestations. Ils assurent une rotation des animaux toutes les 4 heures et ils aiment profondément leurs chevaux. Ne pas comprendre qu'un animal puisse prendre du plaisir à travailler, c''est révélateur d'une méconnaissance abyssale de ce qu'ils sont », tempête t'il.
Insuffisant pour convaincre Mme Pinque, pour qui, « la place d'un cheval n'est pas sur le bitume à respirer des gaz d'échappement. »

Un « minorité » suexposée

Et n'allez pas dire à Martial Druguet que sa calèche emprunterait des pentes trop raides pour la santé de ces chevaux.
« Nos calèches sont des constructions récentes, bien moins lourdes qu'on imagine et équipées de freins hydrauliques. »
Bien que chagriné, il se veut philosophe. « Les gens qui contestent mon activité sont minoritaires ; Ceux qui ont signé cette pétition ne sont pas du coin. Il peut arriver que des gens nous fassent des remarques, mais ils sont peu nombreux ».
Le représentant du maire va même plus loin : « je trouve cette démarche de Meryl Pinque et l'importance que les médias accordent à ces pétitions disproportionnées. Nous sommes face à des militants qui activent leurs réseaux. Ça va très vite d'obtenir des signatures. Et cela conduit à une surreprésentation médiatique de gens extrêmement minoritaires. »
Et de glisser : « la tendance au véganisme existe dans notre société et il faut la respecter, comme les autres, à condition que ces militants soient ouverts à la discussion pour que des points d'équilibre puissent être trouvés.. Or, souvent, il s'agit de gens extrémistes qui ne conçoivent leur rapport avec les collectivités que par le rapport de force et des positions jusqu'au boutistes. »
Les attaques nominatives contre Jean-François Debat ne relèvent selon lui pas du hasard. « On connaît les quelques militants à l'origine de ces polémiques. Ce sont toujours les mêmes. Et je note que parmi les plus actives, figure une dame qui figure sur la liste LREM et qui fait campagne contre Jean-François Debat ».
Une certitude : la mairie ne compte pas dénoncer sa convention avec les Attelages de la Dombes « pour 40 000 signatures dont la plupart de son pas locales. »
Martial Druguet, appelle à l'apaisement.
« J'invite les gens à venir me parler pour que je leur explique la façon dont on s'occupe des animaux. Ils peuvent même passer au domaine pour se rendre compte. »

Etienne Grosjean

Pascal Bouvet : « couper les relations avec ces animaux les condamnerait à disparaitre »

Pascal Bouvet président du collectif du cheval dans l’Ain Equid’Ain.

 

Le docteur Pascal Bouvet, président du collectif du cheval dans l’Ain Equid’Ain(1) a signé mi-janvier un communiqué de presse pour évoquer ce sujet.
« La maltraitance animale est une abjection inacceptable que rien ne saurait justifier. Qualifiée de cruauté elle constitue un délit puni par la loi. La prise en compte du bien-être animal est une évolution de la pensée, salutaire, qui remet en question nos comportements. Elle est la dignité de l’homme de cheval.
Le monde vivant est le fruit d’une symbiose entre les espèces. Tout est question d’équilibre et chacune ne survit que grâce à ses facultés d’adaptation et à la valeur ajoutée qu’elle apporte à son environnement.
L’homme et le cheval partagent des millénaires d’histoire commune. Initialement le cheval était une proie et l’homme son prédateur. Puis, avec la domestication, le cheval est devenu compagnon : de travail d’abord, puis de voyage ou de guerre, et enfin de sport et de loisir. Compagnon de peines et compagnon de joies.
Compagnon ne veut pas dire animal de compagnie car ni la morphologie du cheval ni son comportement ne le prédisposent à ce mode de vie.
Dans le monde actuel couper les relations avec ces animaux les condamnerait à disparaitre.
Vivre ensemble c’est partager. L’homme protège, assure la subsistance et prodigue des soins, l’animal met à disposition sa force, sa vitesse, son courage ou la simple chaleur de sa présence.
Il ne s’agit pas de débattre sur le terrain de l’économie de la filière esquine, mais bien de réfléchir aux enjeux sociétaux que des dérives pourraient induire :
• Quelle société pour demain si on devait abandonner les écoles d’équitation et les valeurs éducatives qu’elles développent, les compétitions et les caractères qu’elles forgent, les manifestations diverses et le lien social qu’elles tissent, les randonnées à cheval et l’entretien de la nature qu’elles sous-tendent, la traction animale et le respect de l’environnement qu’elle prend en compte ?
• Faudra-t-il faire fi de la sympathie que le cheval attise, multigénérationnelle et multiculturelle ? • Demander un jour à nos enfants de remplacer leur heure de poney par une séance de jeu vidéo ?
Nos paysages de l’Ain sont peuplés de très nombreux chevaux. Certains sont jeunes, beaux et vigoureux. D’autres sont âgés et fragiles. Ils bénéficient de soins attentifs de propriétaires de tous crins qui dépensent sans compter pour leur assurer l’entretien adéquat.
Nous pouvons comprendre certaines inquiétudes, nous sommes à même d’expliquer. Mais les prises de position extrêmes n’auraient pour conséquence que la disparition des animaux et non leur bien-être et leur sauvegarde.
Si les passionnés de cheval se sentent menacés, les chevaux peuvent se sentir en danger
Nous sommes aux côtés de ceux qui militent pour la protection des animaux.
Nous combattrons les contre-vérités, nous luttons contre les dérives, et éduquons à de meilleures pratiques.
C’est notre contribution à la bientraitance des chevaux. »


1 : EQUID’Ain est membre du Cluster Équin Santé et Bien-être et acteur de la filière équine. C’est une association composée de sympathisants de tous âges et de professionnels du cheval de tous bords.