ANCIENS EXPLOITANTS AGRICOLES
Une vie de travail pour des retraites de misère

Entre pensions très faibles, souvent inférieurs au seuil de pauvreté et carrières hétérogènes qui sont les retraités agricoles ? Rencontre avec Thérèse Bazonnard de Saint-Cyr-sur-Menthon.
Une vie de travail pour des retraites de misère

C'est mercredi, ça court autour de la maison. Les petits-enfants sont chez mamie. « Ils viennent un mercredi sur deux, on se les partage avec les autres grands-parents ». Thérèse Bazonnard est installée à table avec ses papiers du dossier retraite MSA, aussi minutieusement ordonnés que l'est sa coquette maison. « Nous avons travaillé sur l'exploitation familiale de mon beau-père et à notre retraite notre fils l'ait reprise ».

Agriculteurs de 1969 à 2006

Thérèse et Michel Bazonnard ont passé leur vie à la ferme. « J'ai appris à traire chez mes parents. A cette époque, le service de remplacement n'existait pas et de toute façon ils n'avaient pas les moyens de le financer. C'est nous qui les remplacions lorsqu'ils prenaient quelques jours de repos ». Lors de leur installation en couple, les Bazonnard disposaient d'une quinzaine de vaches laitières, des céréales et quelques lots de volailles. « Nous avons commencé la traite avec des pots en terre qu'il fallait ensuite mettre dans un bidon de 30 litres. Je me souviens encore comme il était lourd à lever ce bidon » évoque Thérèse en souriant. « Après, le tank à lait est arrivé il a bien facilité les choses. En plus du travail à la ferme, j'avais nos 4 enfants à m'occuper. Nous faisions du jardin, les conserves, cela prenait du temps mais on s'y retrouvait à la fin du mois ».

Pas de vacances

Thérèse dit n'avoir jamais pris de vacances avec ses enfants. « Nous ne partions pas. La traite c'était deux fois par jour la semaine et le week-end toute l'année. Heureusement pour nous nos enfants n'étaient pas demandeurs pour partir, ils se trouvaient bien à la campagne, ils nous disaient « mais qu'est ce qu'on va voir de plus ? ». L'été nous les mettions en colonie un mois. Les enfants justement parlons-en. Ils sont censés compter pour le calcul de la retraite. « Cela ne fait que 10% sur une malheureuse retraite. En 2018 j'ai touché 53,37 euros par mois » s'esclaffe Thérèse.

Le montant de leurs retraites

Comparées aux autres régimes, les retraites des exploitants agricoles sont particulièrement faibles. « En tant que conjoint d'exploitant agricole la retraite c'est une misère. Pourtant nous avons travaillé sur l'exploitation tous les jours comme nos maris. En 1998 j'ai pris une part dans le Gaec cela m'a gonflé un peu ma pension. Quand je vois à la télé des gens qui se plaignent car ils n'arrivent pas à vivre avec 2000 euros par mois à deux, je n'en reviens pas. Nous sommes loin de les avoir et on y arrive ! ». Thérèse perçoit 601,57 euros avec la complémentaire et Michel 936 euros. « J'ai fait 2 ans et demi d'aide familiale c'est pas cela qui fait sauter bien haut ! 57 euros/mois, mais c'est une chance quand même d'avoir été déclarée. Lorsque j'étais déléguée FDSEA à la commission femme des agricultrices en 2000, j'en voyais qui n'avaient aucun statut ».

Et maintenant ?

Thérèse et son mari sont bien occupés entre leur jardin qu'ils continuent à faire avec passion, l'entretien de leur maison et leurs petits-enfants. Sur les 4 enfants, seul le fils a décidé de continuer l'agriculture. Les filles sont parties à la ville. Deux sont restées proches de la nature et des animaux. L'une est fleuriste, l'autre s'occupe de toilettage pour chien. Quant à l'aînée, elle a fait le choix de la capitale. Lyon dans un premier temps, puis Paris où elle travaille dans l'informatique. « Comme je lui dis, tu faisais bien la Lyonnaise et je trouve que tu fais bien la Parisienne maintenant » glisse affectueusement Thérèse. Elle ne vient plus souvent à Saint-Cyr-sur-Menthon, ce sont ses parents qui vont la voir. « Cela nous va très bien comme voyage. Nous montons dans le train à Mâcon Loche, elle nous récupère à Paris et une fois sur place elle se charge de nous faire visiter». Des voyages, ils en font aussi avec les anciens exploitants. « Cette une section dynamique, René Geoffroy s'en occupe bien. Vendredi 22 juin, ils partaient toute la journée au barrage de Génissiat ».

Yolande Carron